Insuffisance cardiaque aiguë : pas de conséquences à craindre de l’intensification thérapeutique chez les plus âgés

  • Caroline Guignot
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Une nouvelle analyse des données de l’étude internationale STRONG-HF confirme qu’après un épisode post-insuffisance cardiaque (IC) aiguë, l’intensification thérapeutique rapide conforme aux recommandations européennes est associée à une amélioration de la qualité de vie et un risque d’évènements indésirables comparable chez les moins de 65 ans ou les plus de 65 ans.
  • Pour les auteurs de cette étude, l'âge « souvent considéré comme un obstacle à la titration en raison du risque potentiel d'effets secondaires (…) remet en question cette affirmation. »

Pourquoi est-ce important ?

L'étude STRONG-HF (Safety, Tolerability and Efficacy of Rapid Optimization, Helped by NT-proBNP Testing, of Heart Failure Therapies) a montré que l’intensification thérapeutique rapide et conforme aux recommandations permettait d’améliorer les symptômes et la qualité de vie, ainsi que de réduire le risque de décès toutes causes confondues ou de réadmission pour insuffisance cardiaque à 180 jours, par rapport à une prise en charge conventionnelle. Les analyses en sous-groupes pré-spécifiées ont confirmé que le bénéfice clinique était observé pour tous les groupes d’âge, mais la crainte des effets secondaires peut contraindre les médecins à ne pas proposer cette approche aux patients âgés, fragiles ou atteints de polypathologie, qui eux-mêmes peuvent être plus enclins à préférer un gain sur le plan de la qualité de vie. Cette nouvelle analyse a donc visé à explorer ces deux aspects pour en évaluer la pertinence.

Méthodologie

STRONG-HF est un essai clinique prospectif, randomisé, ouvert et international dans lequel des patients de 18-85 ans admis dans les 72 heures pour une IC aiguë ont été recrutés et randomisés (1:1) entre les soins habituels ou une intensification du traitement médicamenteux conformément aux recommandations. Celles-ci préconisent un suivi étroit des patients dans les 2 à 4 semaines suivant la sortie avec initiation des traitements recommandés aux posologies utilisées dans les essais cliniques ou à défaut aux doses maximales tolérées.

Le traitement médical de l'IC des patients du groupe prise en charge intensive était optimisé par titration avant la sortie. Après celle-ci, une réévaluation périodique des traitements par titration et par évaluation de leur bénéfice-risque était planifiée à travers des visites régulières et un suivi biologique (dosage du peptide natriurétique de type N-terminal pro-B – NT-proBNP). Les patients du groupe contrôle ont été suivis de la même façon qu’habituellement conformément aux pratiques de routine, jusqu'à J90. Dans cette analyse, la population étudiée a été divisée entre les sujets jeunes (≤65 ans) et les sujets plus âgés (>65 ans).

Les critères d'évaluation secondaires étaient l’évolution de la qualité de vie à 90 jours (échelle EQ-5D), le décès toutes causes confondues à 180 jours, et la mortalité toutes causes confondues ou la réadmission pour cause d'insuffisance cardiaque à 90 jours. L'incidence des événements indésirables sur 90 jours a été mesurée.

Principaux résultats

Au total, 1.078 patients ont été inclus et catégorisés pour l’analyse entre patients âgés (>65 ans, n=493, âge moyen 74 ans, 44% de femmes) et patients jeunes (≤65 ans, n=585, âge moyen 53 ans, 34 % de femmes). Les premiers avaient des symptômes d'IC plus sévères, une fraction d’élection ventriculaire gauche plus élevée (40% vs 33%) et une proportion plus élevée d'étiologie ischémique de l'IC (64% vs 34%). La qualité de vie à l’inclusion était similaire dans les deux groupes (59,5 vs 58,2 sur échelle visuelle analogique).

Le taux de décès toutes causes confondues ou de réadmission pour cause d'hypertension à 180 jours était de 21,2% chez les plus âgés contre 17,9% chez les plus jeunes (HR non ajusté 1,21 [0,88-1,68], p=0,23), réduit à 19,7% et 17,9% respectivement (HR 1,12 [0,80-1,55], p=0,51) une fois les décès pour COVID-19 exclus de l’analyse. Aucune différence n'a été observée après ajustement sur la pression artérielle, la présence d’un œdème, l'étiologie de l’IC, et le taux de NT-proBNP. L’intensification thérapeutique a bénéficié aux deux groupes d’âge, même si l’effet était moins prononcé chez les plus âgés, avec un rapport de risque ajusté de 0,51 [0,32-0,82] et de 0,73 [0,46-1,15] sur le critère d'évaluation principal respectivement.

La qualité de vie était améliorée dans les deux groupes à 90 jours, par rapport à l’inclusion, même si ce bénéfice était statistiquement moins élevé chez les patients plus âgés, y compris après un large ajustement sur les paramètres cliniques. De la même façon, le bénéfice en qualité de vie de l’intensification était supérieur chez les moins de 65 ans (différence de mesure ajustée de 5,51 points [3,20-7,82]) et 1,77 points [0,75-4,29] respectivement).

Le taux de patients atteints par des événements indésirables étaient similaires dans les deux groupes d’âge.