Inscrire l’accès à l’IVG dans la Constitution française ?

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
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La décision récente de la Cour Suprême américaine de révoquer l’arrêt Roe vs Wade a suscité de nombreuses réactions en France, avec notamment l’ouverture d’un débat sur l’opportunité de faire entrer « le droit à l’avortement » dans la Constitution. À l’instar de représentants des principaux partis politiques présents au Parlement, le CESE (Conseil économique, social et environnemental) s’est prononcé en faveur de cette inscription. Il rappelle qu’il avait déjà proposé en 2019 que ce droit soit également inscrit dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, comme l’a demandé récemment le Parlement européen.

Une large majorité de Français favorable au droit à l’accès à l’IVG

Une enquête de l’IFOP (Institut français d’opinion publique) commandée par la Fondation Jean Jaurès montre que la grande majorité des Français (83%) « jugent positivement l’autorisation de l’IVG par la loi française » et ce quelle que soit leur orientation politique. Pour 78% d’entre eux (métropole), « une femme doit avoir le droit d’avorter librement », alors que 13% pensent que ce droit doit être soumis à certaines circonstances (par exemple, si la grossesse résulte d’un viol), 3% qu’il doit être autorisé uniquement si la vie de la mère est en danger et que 1% s’y opposent par principe.

Parmi les 17% d’opposants au droit d’accès sans restriction à l’avortement, 25% appartiennent aux strates sociales les moins aisées. Et 30% des personnes se disant religieuses se prononcent contre ce droit.

Et une majorité favorable à l’inscription de ce droit dans la Constitution

La plupart des Français ne craignent pas une remise en cause de ce droit : 56% le jugent définitivement acquis et seuls 31% pensent que sa révocation est possible. Pourtant, 81% des sondés sont favorables à l’inscription de l’accès à l’IVG dans la Constitution française, encore une fois quelle que soit leur orientation politique.

Les arguments en faveur de cette option sont résumés par le CESE. Le droit légal doit être consolidé parce que son effectivité est loin d’être garantie, en raison du faible nombre de médecins qui pratiquent l’IVG et de la diminution du nombre de structures où elle est possible. De plus, « reculer sur le droit à l’avortement, c’est aussi se préparer à reculer sur une multitude de droits, comme le mariage entre personnes de même sexe, ou encore la dépénalisation de l’homosexualité. » Inscrire le droit à l’accès à l’IVG dans la Constitution, c’est prévenir toute tentative de le révoquer.

Les rares opposants à cette inscription font remarquer qu’en réalité, ce droit n’est pas du tout menacé en France. Le faire passer dans la Constitution, c’est prendre le risque d’un emballement juridique pour y faire passer aussi une multitude de droits (par exemple, la discrimination positive en faveur de telle ou telle catégorie sociale). Enfin, c'est susciter un débat et un travail parlementaire qui sont loin d’être prioritaires eu égard aux enjeux auxquels doit répondre actuellement le pays.