Infirmier référent, un concurrent pour le médecin traitant ?

  • Jean-Bernard Gervais
  • Actualités Médicales
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Et un nouveau statut ! La proposition de loi adoptée par l'assemblée nationale le 16 juin dernier1, "visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels", a posé les bases d'une nouvelle fonction : celle d'infirmier référent. De quoi s'agit-il ? Selon l'article 3 bis de cette loi, "l’infirmier référent assure une mission de prévention, de suivi et de recours, en lien étroit avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant". Et d'ajouter : "Tout assuré ou ayant droit âgé de seize ans ou plus indique à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom de l’infirmier référent qu’il a choisi, avec l’accord de celui-ci. Le choix de l’infirmier référent suppose, pour les ayants droit mineurs, l’accord de l’un au moins des deux parents ou du titulaire de l’autorité parentale." De fait, le statut d'infirmier référent avait déjà été défini dans un projet de loi avorté de l'ancien député Thomas Mesnier. Il a été repris, in extremis, dans la PPL (proposition de loi) de Valletoux, via un amendement déposé en séance publique. À l'unisson, les syndicats d'infirmiers libéraux font part de leur contentement. 

Satisfaction des syndicats infirmiers

Le syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) "se réjouit de la réintroduction de cette fonction pour laquelle il milite depuis des années", mais "regrette toutefois la mission de l’infirmier référent ne donne pas la possibilité de renouveler les soins infirmiers pour les patients chroniques. Nous avions fait part de cette possibilité qui apporterait davantage de fluidité dans le parcours de soins des patients chroniques". Pour la Fédération nationale des infirmiers (FNI), en revanche, la possibilité pour l'infirmier référent, de renouveler les soins n'est absolument pas indispensable. "Aujourd'hui notre demande de statut d'infirmier référent ne recherche pas le mimétisme avec le corps médical. Il existe un triptyque socle : médecin, infirmier, pharmacien et il faut travailler de concert. Le médecin est pilier de la coordination, mais que faire quand le médecin est débordé ? Si on veut agir et contenir l'explosion des maladies chroniques et prendre en charge le vieillissement de la population française, il faut que ce triptyque s'organise. Il est vrai que le corps médical freine les réformes, car les médecins pensent que l'on veut prendre leur place, ce n'est pas le cas. Notre objectif est de favoriser l'accès des soins pour tous les patients." 

Vision holistique du patient

Comment l'infirmier référent devrait-il intervenir dans la coordination des acteurs de santé ? "Nous exerçons à 98% de notre temps au domicile des patients, nous nous déplaçons quotidiennement au domicile des patients, nous sommes les plus à même de connaître les besoins de nos patients, nous pouvons donc faire de la prévention, de l'éducation thérapeutique, commune avec d'autres prestataires", détaille Daniel Guillerm, président de la FNI. "Nous travaillons en bonne intelligence avec le médecin traitant mais dans le meilleur des cas, le médecin voit son patient chronique une fois par mois tandis qu'une infirmière peut le voir jusqu’à 1.200 fois par an : on rentre dans le domicile du patient, on le comprend de manière sociale et médico-sociale. Nous sommes à même d'avoir une vision holistique du patient, et de proposer une prise en charge globale, en coordination avec les services sociaux, médico-sociaux, en accord avec le médecin traitant", explique Ghislène Sicre, présidente du syndicat Convergence infirmière.

Pas de valorisation

Qui ne peut néanmoins s'empêcher de souligner que, pour le moment, le statut d'infirmier référent n'est pas valorisé, financièrement : "C'est une bonne nouvelle d'avoir un statut d'infirmier référent, mais nous craignons que ce ne soit pas valorisé. Néanmoins il est nécessaire de savoir qui est référent auprès du patient. Ce statut va permettre de faire reconnaitre le rôle coordinateur de l'infirmier, notamment auprès des structures hospitalières, des familles et des aidants", pense la présidente de Convergence infirmière. "Il faut d'abord installer le statut d'infirmier référent, et puis après discuter de sa valorisation. C'est une fonction que l'on revendique depuis 2012, il faut aujourd'hui prendre en compte les contraintes du système", analyse pour sa part Daniel Guillerm.