Hypertension artérielle pulmonaire : le score de risque ne prédit pas le pronostic

  • Caroline Guignot
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Une analyse statistique suggère que les effets des traitements innovants sur la gravité de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ne permettent pas de prédire les effets du traitement sur l'aggravation clinique et la survie, « ce qui laisse planer un doute sur la pertinence des scores de risque en tant que critères de substitution dans les essais sur l'HTAP », commente l’ éditorial accompagnant l’article.
  • Malgré les recommandations internationales invitant à utiliser des scores de risque composites validés comme critère de substitution dans les essais cliniques ou comme objectif dans la pratique clinique, ces données invitent à la prudence « cette approche pourrait conduire à des conclusions erronées concernant les effets des nouveaux traitements de l'HTAP sur l'aggravation clinique à long terme », reconnaissent les auteurs de l’étude. « Le fait de cibler un critère de substitution non valable pourrait avoir des conséquences négatives, que ce soit par l'obtention d'un résultat positif sans impact sur les résultats à long terme, ou d'un résultat négatif pourtant associé à une intervention efficace sur le pronostic à long terme. »

Pourquoi est-ce important ?

Afin de faciliter la mise à disposition de médicaments innovants, en pneumologie comme dans d’autres aires thérapeutiques, des critères intermédiaires d’évaluation (ou critères de substitution) ont été développés comme alternatives aux critères de jugements principaux nécessitant un suivi prolongé (survie sans aggravation, décès…). Dans l’HTAP, plusieurs scores de sévérité ont ainsi été développés et sont aujourd’hui utilisés dans le cadre des essais cliniques pivots menés dans le développement de nouvelles molécules. Il n’est cependant pas clairement établi si ces scores de gravité constituent de réels critères de substitution pour évaluer le risque d’aggravation ou de mortalité liée à l’HTAP. C’est ce que s’est attaché à évaluer cette étude, à partir des données complètes d’études soumises à la FDA (Food and Drug Administration).

Méthodologie

Cette étude a été conduite à partir des données individuelles de patients HTAP provenant de trois essais cliniques randomisés (AMBITION, SERAPHIN et GRIPHON), dans lesquels avaient été comparés ambrisentan-tadalafil versus l’un ou l’autre, le selexipag versus placebo et le macitentan versus placebo et pour lesquels les données permettant d’établir les scores de gravité validés (COMPERA, COMPERA 2.0, FPHR non invasif, REVEAL 2.0 et REVEAL Lite 2) et le suivi à long terme étaient disponibles. Les chercheurs ont conduit deux types d’analyse : d’une part une méta-analyse permettant d’évaluer l’association statistique entre les effets du traitement et les critères d’aggravation clinique composite ou de mortalité toutes causes. D’autre part, une analyse causale de médiation permet d’évaluer l’effet du traitement en le décomposant d’une part en effet direct et d’autre part en effet indirect. Si l’effet indirect est supérieur au premier, cela suggère que le traitement a principalement un effet sur le critère de substitution plutôt que sur le critère de mortalité ou d’aggravation clinique.

Principaux résultats

Au total, les trois études regroupaient un total de 2.508 patients (âge moyen 49 ans, 78% de femmes, 55% d’HTAP idiopathique) parmi lesquels 2.213 disposaient de données suffisantes pour l’analyse : au cours du suivi, 32% ont connu une aggravation clinique et 6% sont décédés.

L'affectation au groupe traitement expérimental augmentait la probabilité d'atteindre un faible score de risque à 16 semaines par rapport à l'affectation au groupe témoin ou placebo. Elle était aussi associée à un délai plus long avant aggravation clinique, mais aucun effet sur la survie à long terme n’a été identifié. De plus, le fait d’avoir un score de risque faible était associé à un délai plus long avant aggravation clinique et jusqu’au décès, quel que soit le score de risque considéré.

Selon l’analyse de médiation, la proportion de l’effet des traitements sur l'obtention d'un faible score de risque était comprise entre 7 et 13%.

Selon la méta-analyse, l’effet du traitement sur le score de risque n'était pas prédictif de l’effet du traitement sur le délai avant aggravation ou sur le délai de mortalité toutes causes confondues.