Hormonothérapie androgénique substitutive : quel risque pour le cœur ?
- Nathalie BARRÈS
- Résumé d’article
À retenir
- Un essai multicentrique, randomisé, mené en double aveugle et contrôlé versus placebo montre qu’un traitement substitutif à base de testostérone durant une durée moyenne de 22 mois, chez les hommes à risque cardiovasculaire accru, ne favoriserait pas plus le risque de survenue d’un évènement cardiovasculaire majeur par rapport à un placebo.
- Ces données sont rassurantes et permettront d’éclairer les patients sur la sécurité cardiovasculaire liée à cette thérapie.
Pourquoi est-ce important ?
Cet essai répond à un manque d’information, à savoir l’évaluation de la sécurité cardiovasculaire de l’hormonothérapie androgénique substitutive chez l’homme d’âge moyen et plus âgé souffrant d’hypogonadisme. En effet, jusqu’à présent les seules données disponibles provenaient d’études de cohortes rétrospectives ou de petits essais randomisés qui ont abouti à des conclusions contradictoires, amenant la Food and Drug Administration (FDA) à publier le 3 mars 2015 une note exigeant des fabricants de produits à base de testostérone de réaliser des essais cliniques pour éclaircir la situation.
Méthodologie
L’essai TRAVERSE (Testosterone Replacement Therapy for Assessment of Long-term Vascular Evetns and Efficacy Response in Hypogonadal Men) est une étude de phase 4, de non-infériorité, multicentrique, randomisée, menée en double aveugle versus placebo. Des hommes âgés entre 45 et 80 ans ayant une maladie cardiovasculaire préexistante ou à risque élevé de maladie cardiovasculaire signalant des symptômes d’hypogonadisme et ayant des taux de testostérone à jeun inférieurs à 300 ng/dL ont été recrutés. Ils ont été randomisés pour recevoir soit un gel transdermique de testostérone à 1,62% (dose ajustée pour maintenir les taux de testostérone entre 350 et 750 ng/dL) ou un gel de placebo. La sécurité cardiovasculaire qui était le critère principal d’évaluation était évalué par la première occurrence de l’un des composants du critère composite suivant : décès de cause cardiovasculaire, infarctus du myocarde non fatal, accident vasculaire cérébral non fatal. La borne supérieure de non-infériorité de l’intervalle de confiance à 95% était fixée à 1,5.
Principaux résultats
Au total, les données de 5.204 patients ont été analysées (full-analysis), 2.601 provenant de patients du groupe testostérone et 2.603 du groupe placebo. Les données de sécurité ont porté sur les 5.198 patients qui avaient pris au moins une dose de traitement actif ou placebo. La durée moyenne du traitement était de 21,7 mois (±14,1 mois) et la durée moyenne de suivi des patients de 33,0 mois (±12,1 mois).
Sur l’ensemble de la population, 2.847 sujets avaient une maladie cardiovasculaire préexistante et 2.357 un risque cardiovasculaire élevé. À l’inclusion, le taux sérique médian de testostérone était de 227 ng/dL.
Un peu plus de 6 patients sur 10 (61,4% versus 61,7%) ont arrêté le traitement dans le groupe testostérone et placebo respectivement. La dose moyenne de testostérone administrée était de 65 ±22 mg.
À 12 mois, l’augmentation médiane du taux de testostérone était de 148 mg/dL dans le groupe testostérone et de 14 ng/dL dans le groupe placebo.
Un évènement cardiovasculaire primaire est survenu chez 7,0% des patients du groupe sous testostérone et 7,3% du groupe placebo. Le hazard ratio pour la non-infériorité de sécurité cardiovasculaire était de 0,96 [0,78-1,17], p<0,001.
Des cancers de la prostate sont survenus chez 0,5% et 0,4% des patients dans le groupe testostérone et placebo respectivement. L’augmentation du taux de PSA était significativement supérieure dans le groupe testostérone que placebo (0,20 ng/mL versus 0,08 ng/mL, p<0,0001), tout comme la pression artérielle systolique à 6 mois (0,3 mmHG versus -1,5 mmHg, p<0,001). Une incidence plus élevée d’arythmies non fatales justifiant une intervention, des fibrillations auriculaires et des lésions rénales aiguës sont survenues de manière significativement plus fréquente dans le groupe testostérone (5,2% versus 3,3%, p=0,001 ; 3,5% versus 2,4%, p=0,02 ; 2 ?3% versus 1,5%, p=0,04).
Financement
Étude financée par un consortium de fabricants de médicaments à base de testostérone dirigé par le laboratoire AbbVie.
Malheureusement, l’accès à l’intégralité de cet article est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d’un compte.
Vous avez atteint la limite d'articles par visiteur
Inscription gratuite Disponible uniquement pour les professionnels de santé