Greffe trachéo-bronchique : une première mondiale à l’hôpital Avicenne

  • Martinod E et al.
  • JAMA

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

La greffe trachéo-bronchique représente une option thérapeutique chez les patients souffrant de tumeurs proximales broncho-pulmonaires ou présentant des lésions trachéales complexes. Après 10 années de recherche, les professeurs Emmanuel Martinod, chef du service de chirurgie thoracique et vasculaire de l’hôpital Avicenne et Eric Vicaut, chef de l’unité de recherche clinique de l’hôpital Lariboisière ont développé une technique basée sur l’utilisation d’un greffon innovant. Les premiers résultats de leurs travaux viennent d’être publiés dans le JAMA.

Cette série de cas prospective, menée dans des hôpitaux parisiens, montre qu’une technique de transplantation trachéo-bronchique novatrice peut éviter une pneumectomie risquée chez ces patients atteints de lésions broncho-pulmonaires. Pour réaliser cet exploit, les médecins ont utilisé une matrice de tissu aortique et l’ont rigidifié par un stent sur mesure. Les résultats sont prometteurs puisque la fonction des voies respiratoires a pu être conservée chez une majorité de patients après retrait du stent, 19 mois en moyenne après l’intervention, avec un faible taux de mortalité (1 seul patient ayant subi une reconstruction carénale complexe) et sans traitement immunosuppresseur. Les biopsies réalisées sur le greffon 39 mois après la transplantation indiquent qu’un épithélium a pu se régénérer à partir de la trachée adjacente et que du cartilage est présent. Cette ingénierie tissulairein vivoa donc permis de reconstituer une structure proche des tissus d’origine.

 

Une bio-ingénierie des voies respiratoires

Vingt patients ont été inclus dans cette série prospective non contrôlée entre octobre 2009 et février 2017, 13 hommes et 7 femmes, âgés de 24 à 79 ans (54,9 ans d’âge moyen).

Seuls 13 d’entre eux ont finalement pu bénéficier de l’ablation des lésions cancéreuses par un protocole chirurgical standard, 7 au niveau de la trachée, 5 au niveau des bronches souches et 1 au niveau de la carène trachéale.

Après résection, la reconstruction des voies respiratoires a été réalisée à partir d’une allogreffe aortique cryopréservée à -80°C et rigidifiée par un stent pour éviter tout collapsus. Les médecins n’ont pas cherché à préserver la compatibilité de groupes sanguins ou du système HLA du donneur et du receveur.

Des résultats encourageants en termes de survie

Sur l’ensemble des patients transplantés, seul celui ayant bénéficié d’une greffe de la carène n’a pas survécu à 90 jours. Et aucun décès n’a été déploré chez les patients ayant reçu une greffe bronchique (n=7) ou trachéale (n=5).

Quatre d’entre eux ont présenté des morbidités majeures : œdème laryngé, œdème pulmonaire aigu, syndrome de détresse respiratoire aigu et fibrillation auriculaire. Mais aucune n’était directement liée à la technique chirurgicale.

Le stent a pu être enlevé chez 9 patients, 18,9 mois en moyenne suivant l’intervention.

Après une durée de suivi médiane de 3 ans et 11 mois, 10 patients sur 13 sont toujours en vie. Et parmi eux, 8 ont pu continuer à respirer et à parler sans difficulté avec leur greffon après retrait du stent. Par ailleurs le suivi à long terme n’a pas permis d’identifier de complications majeures spécifiquement liées au greffon ou au stent.

Une transformation in vivo du greffon avec le temps

Les patients ont été suivis sur une durée médiane de 3 ans et 11 mois. Et les biopsies prélevées sur le greffon aortique 39 mois après la transplantation montrent que l’épithélium respiratoire s’est reconstitué à partir de la trachée adjacente. La présence de marqueurs spécifiques indique que du cartilage s’est formé, permettant le maintien fonctionnel des voies respiratoires après retrait du stent. Selon l’hypothèse des auteurs, les cellules souches du patient pourraient être à l’origine de cette formation de novo.

Limitations

Étude de faisabilité, non contrôlée, monocentrique, et comportant un nombre limité de patients.