Faut-il interdire Halloween ! Les cardiologues québécois s'interrogent…

  • Nathalie BARRÈS
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Le risque d’infarctus du myocarde ne serait pas augmenté le jour même, mais le lendemain de la fête d’Halloween.
  • Les hommes sans antécédent de santé particulier seraient les plus à risque.
  • Ces données incitent la communauté médicale québécoise à s’interroger sur le bien fondé en termes de santé publique du maintien de la fête d’Halloween.

Pourquoi est-ce intéressant ?

La tradition d’Halloween est une fête traditionnelle païenne originaire des Îles Anglo-Celtes célébrant la soirée du 31 octobre, veille de la fête catholique de la Toussaint. Halloween provient de « All Hallows’Eve » que l’on peut traduire par « la veille de tous les saints ou la veillée de la Toussaint ». Cette fête a évolué pour devenir une soirée où les enfants vont de maison en maison déguisés en mort-vivants, sorciers, fantômes ou démons pour effrayer leurs voisins et négocier leur vie contre quelques friandises. Les auteurs de cette étude rappellent que des données de la littérature scientifique ont montré l’existence d’un sur-risque d’infarctus du myocarde lors des fêtes de Noël ou du Nouvel-an. Ces périodes peuvent être propices au stress émotionnel, à l’anxiété, à l’humeur dépressive ou à quelques excès alimentaires, autant de facteurs susceptibles d’augmenter le risque d’infarctus du myocarde. Halloween pourrait ainsi rejoindre les fêtes de fin d’année sur cet aspect. Enfin, la consommation en grande quantité d’aliments sucrés et/ou gras augmente le risque cardiovasculaire. Pourquoi un sur-risque chez les personnes sans morbidité et chez les hommes ? Les auteurs l’expliquent par le manque d’information des premiers concernant les symptômes précoces de l'infarctus du myocarde et la plus forte attirance des seconds pour la malbouffe. Nous invitons les lecteurs à la plus grande prudence concernant ces hypothèses.

Méthodologie

Cette étude cas-croisés est l’une des plus sérieuses menées sur le sujet … enfin, selon les auteurs. Ces derniers se sont intéressés au risque d’infarctus du myocarde chez les adultes en période d’Halloween. Ils ont analysé les données d’enregistrement des patients admis à l’hôpital pour infarctus du myocarde au Québec entre le 15 octobre et le 15 novembre entre 1989 et 2018. Il convient de noter que le Comité d’Examen institutionnel du Centre Hospitalier de l’Université de Montréal a renoncé à l’examen éthique puisque les données étaient anonymes.

Les auteurs ont pris soin d’utiliser la classification internationale des maladies pour inclure tous les cas d’infarctus du myocarde avec ou sans élévation du segment ST. Pour limiter le risque de biais, les chercheurs ont utilisé des algorithmes rigoureux contribuant à ce qu’aucune donnée ne soit manquante. Un croisement des cas stratifiés dans le temps a permis de comparer jour à jour les caractéristiques du jour de survenue d’un infarctus chez un individu par rapport à un jour contrôle proche dans la même semaine sans événement cardiovasculaire pour l’individu. Cette méthodologie permettait de s’affranchir des effets liés à certains jours de la semaine en particulier ou aux variations circadiennes. Halloween étant célébrée le 31 octobre au soir, les hospitalisations pour infarctus ont été mesurées le soir même et le lendemain et comparées (jours contrôles) aux hospitalisations tous autres jours dans la période du 28 octobre au 3 novembre). Pour une analyse plus fine le protocole prévoyait une stratification des sujets sur l'âge (<55 ans, 55-64 ans, 65-74 ans, 75-84 ans et ≥85 ans), le sexe, la présence ou non d’une hypertension et d’antécédent d’infarctus du myocarde ainsi que sur la présence ou non d’une obésité, d’un diabète, d’une dylipidémie, de consommation de drogues, d’alcool et/ou de tabac, ....

Les chercheurs précisent que les résultats de leur étude ne peuvent être transposés à des zones où Halloween n’est pas célébrée.

Principaux résultats

Sur les 54.699 patients ayant eu un infarctus du myocarde, 3,1% étaient survenus le lendemain d’Halloween. Une fréquence accrue des cas a été observée chez les hommes et chez les sujets âgés de 65 à 84 ans. L'augmentation du risque d’infarctus du moycarde le lendemain de la fête d’Halloween a été évaluée à 13% (odds ratio 1,13 [1,07-1,20]).

Le risque s’est révélé être plus important chez les hommes, les sujets âgés de 65 à 74 ans et ceux sans antécédents médicaux. Ainsi, l'absence d'antécédent d'infarctus du myocarde ou le fait d'être en bonne santé ne semblent pas être des facteurs protecteurs d’infarctus du myocarde en période d’Halloween.

Fait intéressant, le jour même d’Halloween serait plutôt associé à une diminution du risque d’infarctus du myocarde. Les auteurs n’ont pas émis d’hypothèse spécifique sur le sujet.

Enfin, aucun autre jour proche d’Halloween n’a été associé à une plus forte probabilité d’infarctus du myocarde.

Principales limitations

Le manque de données sur les habitudes alimentaires et l’indice de masse corporelle n’ont pas permis aux chercheurs d’aller plus loin sur l’association entre malbouffe et risque d'infarctus lors de la fête d’Halloween.

Financement

Cette étude a été soutenue par la Heart & Stroke Foundation of Canada et le Fond de Recherche du Québec-Santé.

Conflit d’intérêt

Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêt.