Entretiens de Nutrition 2022 - Quel est l'impact des sucres sur le coeur ?

  • Caroline Guignot
  • Actualités Congrès
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Les glucides peuvent être délétères pour la santé cardiovasculaire lorsque la balance énergétique est défavorable, qu’il existe un surpoids, que l’activité physique est insuffisante. Dans ce cas, la quantité et la nature des glucides vont influencer le risque cardiovasculaire (CV). C’est ce qu’a présenté Jean-Michel Lecerf lors d’une session dédiée des Entretiens de Nutrition qui ont eu lieu à l’Institut Pasteur de Lille le 2 et 3 juin 2022.

Rappel de quelques mécanismes

Pour rappel, en cas de balance énergétique positive, un index glycémique (IG) élevé favorise l’augmentation de l’insulinémie et donc le stockage de graisses, sachant que le phénomène reste hétérogène sur le plan interindividuel, notamment en lien avec des composants de type génétique.

Le saccharose, le fructose et l’alcool consommés en excès et en situation de balance énergétique positive conduisent à une production d’acide palmitique par le foie, inclus secondairement dans les triglycérides (TG) et conduisant à la production de lipoprotéines de très basse densité (VLDL) riches en TG et contenant des acides gras saturés athérogènes. Les VLDL peuvent favoriser une stéatose locale ou une hypertriglycéridémie circulante. Il est aussi décrit qu’une alimentation trop riche en glucides conduit à la formation de lipoprotéines de basse densité (LDL) petites et denses, plus athérogènes. La relation entre LDL et risque athérogène diminue en cas de perte de poids, à condition de réduire la part glucidique de l’alimentation.

L’impact des boissons sucrées

La nature et la composition des aliments en sucre ont un impact particulier : concernant les boissons sucrées, différentes études ont montré que la fréquence de consommation était associée à un risque accru de syndrome métabolique, dès lors qu’une boisson sucrée était consommée par jour. Dans une cohorte d’enfants âgés de un an, consommant en moyenne 120 ml/jour de jus de fruits, une augmentation du tissu adipeux viscéral, abdominal sous-cutané et abdominal total a été constatée six ans après le début de l’étude. En revanche, la consommation régulière de lait à cet âge est plus importante et moins délétère chez l’enfant.

Chez l’adulte, le risque d’intolérance au glucose est augmenté chez ceux qui consomment beaucoup de fructose ou de boissons aux fruits, mais il ne l’est pas chez ceux qui consomment des jus de fruits frais. Notons également que la consommation d’un litre de boisson sucrée par jour pendant 1 mois par des sujets obèses conduit à une augmentation de l’adiposité viscérale et une insulinorésistance, ce que n’induit pas le lait. Le risque de développer un diabète de type 2 serait également significativement accru dans une population adulte, dès que la consommation dépasse une boisson sucrée par jour.

Sucres et facteurs de risque cardiovasculaire

Sur le plan du poids, les données épidémiologiques suggèrent que ceux qui consomment le plus de sucreries sont souvent les plus minces, et inversement : ceci découle probablement d’une causalité inverse, ceux qui en consomment peu étant potentiellement ceux qui ont un IMC plus élevé et donc ceux qui limitent leur consommation, tandis que ceux qui sont génétiquement ou activement aptes à pas prendre de poids sont peut-être plus enclins à en consommer.

Sur le plan de l’hypertension artérielle (HTA), beaucoup d’études montrent qu’une consommation élevée en glucides stimule le système sympathique et donc la résistance vasculaire, conduisant à un effet hypertenseur en situation de balance énergétique positive, et ce indépendamment du poids. Le risque reste toutefois limité (+12%).

Enfin, sur le plan athérogène, des données (épidémiologiques principalement) décrivent l’effet des glucides : une alimentation comportant une charge glycémique élevée conduit à une augmentation du risque CV, tandis qu’un régime pauvre en glucides conduit à diminuer le risque de cardiopathie ischémique. Par ailleurs, lorsque les acides gras (AG) saturés sont remplacés par des glucides, le risque d’infarctus du myocarde augmente de 33% en cas d’IG élevé, et reste inchangé en cas d’IG bas.

Il est enfin décrit que la sténose carotidienne de femmes ménopausées progresse de façon supérieure chez celles qui consomment davantage d’AG saturés que de glucides et inversement (même si ces données épidémiologiques imposent de se méfier des liens de causalité inverse et des potentiels facteurs de confusion).