Entretiens de Nutrition 2022 - Obésité sarcopénique : défi diagnostique et thérapeutique
- Caroline Guignot
- Actualités Congrès
La sarcopénie est un syndrome gériatrique correspondant à une baisse généralisée de la masse et de la force musculaires qui peut se traduire par des incapacités physiques, une altération de la qualité de vie voire un risque pronostique. Associée à l’obésité (masse grasse élevée, masse maigre faible, indice de masse corporelle ou IMC élevé), elle constitue un défi tant sociétal, du fait du vieillissement de la population, qu’individuel (sur le plan de la mobilité, de la qualité de vie) que médical (dépistage, diagnostic), ou de prise en charge. Une session des Entretiens de nutrition qui ont eu lieu à Lille les 2 et 3 juin 2022 a évoqué le sujet.
La sarcopénie est un syndrome gériatrique associant une diminution progressive et généralisée de la masse et de la force musculaires susceptible d’entraîner incapacité physique, altération de la qualité de vie voire le décès. L’obésité sarcopénique correspond à une situation dans laquelle l’IMC élevé est associé à une masse grasse élevée et une masse maigre faible. Sa prévalence augmente avec l’âge (sarcopénie primaire) mais elle reste multifactorielle et peut être secondairement favorisée par certaines habitudes de vie (alimentation déséquilibrée, inactivité physique, antécédents de régime…), un alitement ou certaines pathologies chroniques généralement associées à une inflammation ou à une insulinorésistance (diabète, insuffisance d’organes, malabsorption…).
Un récent consensus diagnostique
Il n'y avait pas de consensus sur la définition précise et des critères diagnostiques de l’obésité sarcopénique jusqu’au récent consensus de l’ESPEN (European Society for Clinical Nutrition and Metabolism) et l’EASO (European Association for the Study of Obesity) évoquant également leurs préconisations en matière de dépistage [Danini LM, Clin Nutr 2022] : ce dernier consiste à identifier les sujets à risque, à savoir ceux ayant un IMC et un tour de taille élevés, ET suspectés de sarcopénie (signes cliniques, facteurs de risque ou questionnaire SARC-F reposant sur 5 questions simples et rapides évaluant les difficultés à soulever une charge de 4,5 kg, traverser une pièce, se lever d’un lit ou d’une chaise, monter dix marches et sur l’appréciation du nombre de chutes durant l’année passée).
Pour ceux qui présentent les deux conditions, l'étape du diagnostic repose sur deux piliers :
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En premier lieu l'évaluation de la fonction musculaire squelettique. Les individus ayant une force au test du hand grip, inférieure à 27 kg pour les hommes ou 16 kg pour les femmes, ou ayant besoin de plus de 15 secondes pour effectuer 5 levers de chaise peuvent être considérés comme ayant probablement une sarcopénie.
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Enfin, la confirmation est apportée par la mesure de la composition corporelle par absorptiométrie biphotonique (ou DEXA, rapport masse maigre appendiculaire/taille2 <7 kg/m² chez l’homme et 5,5 kg/m² chez la femme) ou par impédancemétrie.
La sévérité de la sarcopénie est définie à partir de la diminution de la performance musculaire (vitesse de marche <0,8 m/s, un mauvais test SPPB fondé sur un test d’équilibre, de vitesse de marche et de lever de chaise, ou sur le test Up&Go) et la présence de complications attribuées à la sarcopénie.
La difficulté de l’obésité sarcopénique tient au fait que celle-ci perturbe le métabolisme des protéines musculaires sous l’influence de dérégulations métaboliques, nutritionnelles ou physiques. Elle est associée à une morbimortalité accrue, avec une augmentation de l’adiposité centrale et ectopique et à une perte musculaire liée à l’inflammation et à l’insulinorésistance.
Elle conduit à la production d’acides gras et d’adipokines et une inflammation, ainsi qu’une accumulation lipidique intramusculaire qui, dans leur ensemble, vont perturber la production protéique (lipotoxicité sur le renouvellement des protéines musculaires et sur la fonction mitochondriale impliquée dans la synthèse protéique). L’origine de ces mécanismes et leur survenue chez une fraction seulement des patients obèses suggère l’existence de cofacteurs qu’il reste à identifier exhaustivement.
La prise en charge s’avère donc particulièrement délicate puisqu’il s’agit de diminuer la masse grasse tout en préservant la masse musculaire. Il est donc nécessaire d’identifier les motifs expliquant l’étiologie de cette sarcopénie et pour cela retracer la trajectoire corporelle.
Ainsi la prise en charge est le plus souvent multimodale et personnalisée : un régime hypocalorique seul peut s’avérer délétère dans le sens où il peut fragiliser la masse musculaire. Il faut être extrêmement prudent et viser préférentiellement une réduction très modérée de l’apport calorique associé à de l’exercice physique (endurance et renforcement). Il faut aussi augmenter les apports protéiques et l’activité physique en synergie, avec des protocoles qui restent à définir (nature et équilibre des apports protéiques, typologie et durée de l’activité physique…).
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