Entretiens de Nutrition 2022 - Diversification : mieux vaut manger heureux que sainement !


  • Caroline Guignot
  • Actualités des congrès
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L’enfant a naturellement des capacités d’autorégulation pendant ses premiers mois de vie, avec une préférence pour le gras et le sucré, une aversion pour l’amer et l’acide, et une autorégulation des quantités consommées. Durant sa 2 e année de vie cependant, son comportement commence à être modifié avec l’apparition de la néophobie et de la sélectivité alimentaires et pour certains un désintérêt pour l’alimentation (petit appétit). Or, le délitement de cette autorégulation est soumis au poids des contraintes et des pratiques éducatives qui vont être mises en place par les parents et qui vont conduire à des mécanismes renforçant ou non se caractère devenu plus difficile. Une session des Entretiens de Nutrition qui ont eu lieu à Lille le 2 et 3 juin 2022 a décrit les approches favorables ou non à la diversification. 

Ainsi, les comportements extrêmes des parents sont plutôt délétères : d’une part, ceux trop permissifs (choisir les aliments qui plaisent à l’enfant, ajouter du ketchup dans les légumes, recourir aux aliments récompenses …), réduisent les chances d’exposition à de nouveaux aliments, alors qu’il est décrit que 8 à 10 expositions peuvent être nécessaires pour qu’un aliment soit finalement admis par un enfant. À l’inverse, un comportement trop autoritaire (forcer l’enfant, chantage…) créé une tension émotionnelle que l’enfant associe à l’aliment, en renforçant le rejet.

L’aspect contre-productif des messages de santé publique

Différentes expérimentations ont montré l’effet contre-productif des messages de santé associés à l’alimentation, car les enfants intègrent très tôt l’idée qu’un aliment bon pour la santé est moins savoureux que les autres. Ceci a par exemple été démontré en comparant la différence d’appréciation d’une même boisson par un groupe d’enfants selon qu’elle était ou non étiquetée bonne pour la santé : en moyenne, les enfants trouvaient que celles sans allégation était meilleure, que les enfants aient entre 9-11 ans ou entre 3-5 ans.

D’autres expériences ont aussi montré que les personnes sous-évaluent généralement l’énergie contenue dans un aliment hyperénergétique (type hamburger) dont l’image leur est présentée, lorsque celle-ci est accompagnée d’un message de santé publique (mangez équilibrer, mangez des fruits et légumes…), la solution ‘saine’ de compensation qui leur est apportée déculpabilisant le participant dans son envie de consommer.

Un ensemble d’approches (fiches recettes, fiches aliments, blog, forum…) autour d’une alimentation saine sans aucun message de ce type, privilégiant au contraire l’aspect du plaisir (approche hédonique) favorise efficacement la consommation de fruits et légumes.

Enfin, à l’échelon individuel, lorsqu’on met un groupe d’enfants face à une offre pléthorique sans supervision adulte, on observe que ceux qui consomment le plus d'aliments ‘interdits’ sont les filles dont les mères se préoccupent le plus de la minceur et qui contrôlent le plus la composition de l’alimentation de leur enfant.

Quelles solutions ?

Les pratiques de pression, de restriction ou les distractions rendent le comportement des enfants dépendant des stimuli de l’environnement plutôt que de leurs propres sensations. Il faut donc préserver leurs capacités à s’autoréguler en limitant les hypersollicitations, en limitant la taille des portions, le contenu des placards, éviter les aliments récompense ou réconfort. Il ne faut stigmatiser aucun aliment, ne pas parler du poids, mais les aider à se concentrer plus largement sur leurs sensations. A l'inverse, on recommande plutôt de stimuler le plaisir autour des aliments, exposer de façon répétée sans renoncer au 1 er , 2 e ou 3 erefus, faire participer l’enfant à la préparation des repas, favoriser une ambiance conviviale et un climat chaleureux sans distraction au moment des repas, et fixer des règles simples (demander de goûter systématiquement), sans coercition, et de façon partagée entre les parents.  Des travaux ont décrit que si la majorité des couples ont une perception consensuelle des comportements alimentaire de leur enfant, les pères ont plus souvent des comportements permissifs ou autoritaires par rapport aux mères. La convivialité et la socialisation sont des vecteurs facilitant l’acceptation de la diversité alimentaire, par mimétisme.