EASD 2022 — Le chemin tortueux vers la rémission dans le diabète de type 2

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Lors de l’édition 2022 du symposium de l’Association européenne pour l’étude du diabète (European Association for the Study of Diabetes, EASD) intitulé « Rémission du diabète de type 2 – réalité ou fiction ? », des experts ont discuté de la définition de la rémission du diabète de type 2 (DT2), des différentes interventions qui favorisent la rémission du diabète et de la résurgence du diabète au fil du temps.

Qu’est-ce que la rémission du DT2 ? (Amy Rothberg, États-Unis)

En 2021, le rapport de consensus actualisé de l’Association américaine du diabète (American Diabetes Association) a défini la rémission du diabète comme « un retour de l’hémoglobine glyquée (HbA1c) à un taux de moins de 6,5 % qui se produit spontanément ou à la suite d’une intervention et qui persiste pendant au moins 3 mois en l’absence de pharmacothérapie hypoglycémiante habituelle ». Il est également possible d’utiliser comme critères un taux de glucose plasmatique à jeun inférieur à 126 mg/dl ou un taux d’HbA1c estimé inférieur à 6,5 % calculé à partir des valeurs du monitorage continu du glucose. Tous les médicaments hypoglycémiants doivent être suspendus pendant un intervalle suffisant pour évaluer comment l’absence du médicament affecte les mesures de l’HbA1c. La rémission ne peut être évaluée chez les patients qui reçoivent des traitements hypoglycémiants à d’autres fins, comme l’insuffisance cardiaque, la protection rénale ou la perte de poids.

Le traitement du DT2 connaît actuellement un changement de paradigme et l’accent est désormais mis sur la prise en charge de l’obésité. La Dre Rothberg a mis en avant quelques études qui ont montré que des changements apportés avec succès au mode de vie, la chirurgie bariatrique ou les médicaments hypoglycémiants qui favorisent la réduction du poids sont tous des éléments importants de la prise en charge du diabète et peuvent aider les patients à atteindre la rémission. Par exemple, la sensibilité à l’insuline s’est améliorée 3 à 6 mois après la perte de poids grâce à une intervention comportementale rigoureuse chez des personnes obèses présentant un glucose à jeun altéré et atteintes d’un DT2. Un essai récent a montré qu’une plus grande proportion de patients atteints d’un DT2 ayant fait l’objet d’une chirurgie laparoscopique de bypass gastrique Roux-en-Y avec anneau en silastic (47 %) a obtenu une rémission de leur DT2 à 5 ans par rapport à ceux ayant fait l’objet d’une gastrectomie longitudinale laparoscopique. La Dre Rothberg a conclu en déclarant que « les tests visant à déterminer le maintien à long terme de la rémission doivent être effectués chaque année, ainsi que les tests systématiquement recommandés pour identifier les complications potentielles du diabète. »

Une perte de poids de 10 à 15 kg est recommandée pour la rémission (Michael Lean, Royaume-Uni)

La prise de poids est l’un des principaux facteurs du DT2, et des études antérieures ont démontré que la perte de poids permet de prévenir la progression du prédiabète vers le diabète. Selon une étude observationnelle menée en 1990, une perte de poids de 14 kg chez des patients atteints d’un DT2 a amélioré leur espérance de vie de 7 ans. De même, en 2008, un essai de faible envergure a démontré que 83 % des patients ayant perdu plus de 10 kg de poids corporel grâce à la chirurgie bariatrique sont parvenus à une rémission du DT2.

L’essai DiRECT a été conçu pour déterminer s’il était possible de parvenir à une rémission du DT2 grâce à un programme nutritionnel Counterweight Plus (régime hypocalorique de substitution, réintroduction d’aliments et maintien de la perte de poids à long terme) sans avoir recours à des médicaments ou à la chirurgie. Dans le bras d’intervention, les patients ont perdu en moyenne 10 kg de poids corporel à 12 mois et 46 % des patients sont entrés en rémission. Même après 2 ans, plus de 70 % des patients ayant perdu 10 kg de poids corporel sont restés en rémission. Une analyse de sous-ensembles de l’étude DiRECT a démontré une perte de graisse ectopique et une amélioration de la fonction des cellules β chez les patients étant parvenus à la rémission. Les bénéfices de la perte de poids par l’alimentation ont été confirmés dans l’étude RETUNE menée chez des patients atteints d’un DT2 dont l’indice de masse corporelle était inférieur à 27 kg/m2. Même si le Dr Lean s’est montré plus favorable aux programmes de régimes à faible teneur en glucides soutenus par des professionnels, il a simplement évoqué la chirurgie bariatrique et les traitements pharmacologiques comme des compléments à la modification du mode de vie. Il a conclu la discussion en soulignant la gravité du DT2 en tant que maladie. Le taux de survie à 10 ans n’est que de 50 % pour le DT2, alors qu’il est de 80 % pour le cancer du sein. « La perte de poids pour la rémission est aussi importante que la chimiothérapie l’est pour le cancer » a-t-il déclaré.

Rechute après rémission (Blandine Laferrere, États-Unis)

La rechute peut être définie comme une résurgence du DT2 après une période de rémission, et elle peut être mesurée par des taux d’HbA1c de 6,5 % ou plus. La rémission peut ne pas durer même après que les patients ont reçu un traitement par pharmacothérapie ou par insulinothérapie intensive à court terme, ou qu’ils ont fait l’objet d’une chirurgie ou de modifications du mode de vie. Une méta-analyse de 2013 a démontré un taux de rechute de 30 % chez les patients atteints d’un DT2 d’apparition récente et présentant un taux d’HbA1c très élevé qui ont reçu une insulinothérapie intensive à court terme. De même, les patients traités par des médicaments à base de glucagon-like peptide-1 (GLP-1) comme l’exénatide ont rechuté quelques semaines seulement après l’arrêt du traitement, ce qui souligne le fait que les médicaments à base de GLP-1 n’ont apporté aucun bénéfice permanent. Dans l’essai Look AHEAD, les patients ayant fait l’objet d’une intervention intensive sur le mode de vie sont parvenus à une perte de poids significative et à une rémission de leur DT2 la première année, mais une rechute du DT2 s’est ensuite produite, probablement en raison d’une reprise du poids. La Dre Laferrere a également cité quelques études ayant porté sur la durabilité de la rémission du DT2 après une chirurgie bariatrique. Le taux de rechute varie fortement de 12 % à 94 % en fonction des années de suivi depuis la chirurgie. 

Bien que le mécanisme exact de la rechute ne soit pas connu, la perte progressive de la fonction des cellules β est susceptible d’être un facteur prédictif. La Dre Laferrere a cité l’une de ses récentes publications qui a montré que les améliorations de la fonction des cellules β se sont maintenues dans le temps chez les patients ayant obtenu une rémission complète, alors qu’elles se sont détériorées après 2 ans chez les patients susceptibles de rechuter. En outre, ceux qui avaient reçu de l’insuline avant l’opération, dont le diagnostic de diabète remontait à plus longtemps ou qui étaient incapables de maintenir une perte de poids à long terme étaient beaucoup plus susceptibles de connaître une rechute de la maladie. Par conséquent, la question demeure : peut-on prévenir les rechutes du DT2 ? La Dre Laferrere a conclu sa session en assurant l’auditoire qu’il est possible de prévenir la rechute du DT2 par une intervention précoce, le maintien d’un mode de vie approprié et l’adoption de stratégies visant à préserver la fonction des cellules β.