Douleurs post-opératoires : encore des progrès à faire !

  • Zaslansky R
  • Eur J Pain

  • Caroline Guignot
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Selon une enquête menée auprès d’équipes appartenant au réseau de recherche international PAIN OUT, près d’un patient opéré sur deux (toutes chirurgies confondues) aurait une douleur intense dans les 24 heures suivant son opération, il y aurait une incidence notable de ces douleurs sur leur fonctionnement et un sujet sur 5 serait insatisfait de la façon dont sa douleur est prise en charge.
  • Les modalités de recours aux opioïdes dans les circonstances les justifiant divergent des recommandations.
  • Les résultats des questionnaires patients et des modalités de prise en charge étaient très hétérogènes, mais leur analyse révèle que la plupart de la variance observée n’est pas expliquée par  le profil du patient, son pays d’appartenance, la nature de sa chirurgie ou l’existence d’une douleur pré-existante. Les auteurs suggèrent que des facteurs psychologiques, sociaux, culturels et de littératie en matière de santé interviennent et mériteraient d’être intégrés dans les protocoles d’évaluation, de prise en charge et de recherche en matière de lutte contre la douleur.

Méthodologie

PAIN OUT est un réseau de recherche international, combiné à la conduite d’un registre, permettant d’évaluer et de faire évoluer les pratiques autour de la douleur. Il regroupe des praticiens de Chine, du Mexique et de huit pays européens (France, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Italie, Espagne, Irlande, Serbie). Dans ce registre, ces investigateurs ont enregistré leurs patients âgés de 18 ans ou plus, ayant eu une opération et pour laquelle une évaluation de la douleur au premier jour post-opératoire était conduite selon un questionnaire formalisé (PODI). Celui-ci évaluait la douleur (intensité cotée par le patient entre 0 et 10, durée, …), l’impact de cette douleur sur les activités (changement de position dans le lit, sommeil…), les effets secondaires de cette douleur (nausées, vertiges…) et la perception des soins (demande d’information ou d’antalgique insatisfaite…

Principaux résultats

L’enquête a été conduite entre 2017 et 2019 auprès de praticiens appartenant à 64 hôpitaux différents (73% d’hôpitaux universitaires, 40% dont le nombre de lits<500, 26% et 21% ayant 500-1.000 lits et 1.000-2.000 lits respectivement). Ils ont inclus dans l’analyse 10.415 patients pris en charge par 105 services de chirurgie. Les procédures chirurgicales les plus courantes étaient des opérations de chirurgie générale (42%: cholécystectomie, gastroentérostomie ou gastrectomie laparoscopiques), d'orthopédie ou de traumatologie (41% remplacement de la hanche ou du genou, réduction ouverte de fracture), puis d’obstétrique ou gynécologie (15% césarienne, hystérectomie par laparoscopie…) ou d’urologie (7% :néphrectomie, prostatectomie …).

Au total, 48,7% de l'ensemble des patients ont coté la pire douleur dans la première journée post-opératoire ≥7/10, sachant que 24,3% avaient eu une douleur intense pendant plus de 50% du temps depuis l'opération. Ils étaient entre 20 et 33,6% à déclarer une interférence significative de la douleur sur les différentes activités évaluées et ils étaient entre 9,3 et 26,8% à avoir ressenti différents effets secondaires liés à la douleur. Ils étaient enfin 17,4% à être insatisfaits du traitement antalgique et 22,0% à avoir souhaité un traitement de la douleur plus important que celui reçu.

La douleur a été évaluée chez 98,5% de la cohorte. Il y avait une grande variabilité des classes d'analgésiques non opioïdes administrés au cours des différentes phases périopératoires et dans les différents pays participants. Au total, seuls 59% de ceux ayant déclaré une intensité ≥7/10 ont reçu un opioïde systémique. Parallèlement, 94,7% de la cohorte a reçu un analgésique non opioïde et 28% un traitement non pharmacologique. Un opioïde systémique a été administré à 48,8% de la cohorte (dont 57,9% par IV). Près de 90 % de la variance dans l’évaluation de la douleur par les patients ne sont pas expliqués par le service d’admission, les variables démographiques ou l’existence d’une douleur préexistante. Parallèlement, si 32% de la variance des modalités de traitement antalgique sont expliqués par le service d’admission et 18,9% par le pays d’appartenance, 39,5% de cette variance reste inexpliquée.