Détection de poliovirus en Europe : faut-il s’inquiéter ?

  • Marie Torre
  • Actualités Médicales
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Malgré l’élimination de la poliomyélite de la région Europe de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), des poliovirus ont été détectés dans les eaux usées de Londres et des cas de poliomyélite paralytique ont été déclarés en Israël ou en Ukraine avant le début du conflit… (1,2) Aujourd’hui, faut-il avoir peur d’une résurgence des cas de poliomyélite en France ?

 

Un objectif d’éradication encore repoussé en 2026

La poliomyélite est une infection virale liée à des entérovirus :

  • Les poliovirus sauvages de sérotypes 1, 2 et 3 (PVS 1 à 3) ;
  • Les poliovirus mutés, dérivés du vaccin vivant atténué administré par voie orale. (3,4)

Dans certaines conditions particulières (immunité insuffisante de la population), les souches vaccinales atténuées ont pu muter et retrouver leur virulence auprès des personnes non vaccinées : PVDVc2 (PolioVirus Dérivé du Vaccin circulant de type 2) dérivé du poliovirus de type 2, et plus rarement PVDVc3 dérivé du poliovirus de type 3.

Les éradications des poliovirus sauvages de types 2 et 3 ont été respectivement prononcées en 2015 et 2019 au niveau mondial. En 2022, 5 des 6 régions OMS ont éradiqué la poliomyélite (Afrique, Amériques, Asie du sud-est, Europe et Pacifique occidental). Seuls dans la région Méditerranée orientale, 2 pays restent endémiques : l’Afghanistan et le Pakistan, où circulent toujours le poliovirus sauvage de type 1 (PVS1) et le poliovirus dérivé du vaccin oral PVDVc2. (5)

Plusieurs pays dans le monde sont à risque de voir réapparaître des épidémies de poliomyélite sur leur sol, et ce via :

  • L’importation de poliovirus sauvage ou dérivés du vaccin oral d'un autre pays, ou
  • L'émergence locale de poliovirus dérivés du vaccin oral.

Dans la région Europe de l’OMS, le Royaume-Unis (poliovirus PVDVc2), l’Ukraine (PVDVc2) et Israël (PVDVc3) sont directement concernés.

 

Détection de poliovirus dans la région Europe de l’OMS

Au Royaume-Uni, plusieurs virus dérivés du VDPV2 ont été détectés dans les eaux usées de Londres entre février et mai 2022, suggérant que des personnes infectées excrétaient ces souches dans leurs fèces. Aucun cas de paralysie n'a pour le moment été signalé. (1,2) Les autorités anglaises ont rappelé aux personnes résidant à Londres l’importance de mettre à jour leur vaccination, notamment celle des jeunes enfants, quelle que soit leur origine.

En Ukraine, 2 cas de paralysie liés à des PVDVc2 et 19 cas contacts ont été confirmés entre octobre 2021 et avril 2022. Le risque de propagation est élevé, en raison d’une faible immunisation de la population (73,3 % en décembre 2021) et du conflit engagé avec la Fédération de Russie (déplacement massif de populations, difficultés d’accès aux soins, campagnes de vaccination perturbées…).

En Israël, 7 cas liés au PVDVc3 ont été rapportés en mars 2022, alors qu’aucun cas n’avait été déclaré depuis 1989.

 

Risque faible pour la population française

En France, la vaccination contre la poliomyélite repose sur l’utilisation du vaccin inactivé, qui ne présente pas le risque de voir émerger un poliovirus dérivé du vaccin. (1)

La couverture vaccinale contre la poliomyélite est élevée, la vaccination procurant une bonne protection contre la maladie en cas de contamination : 99,5 % pour la primo-vaccination en 2022, mais seulement 44 % chez les personnes de 65 ans et plus en 2011. (1,6,7) L’enjeu est donc de maintenir une couverture vaccinale élevée et homogène pour toutes les populations sur le territoire national, tant que la maladie n’est pas éradiquée à l’échelle planétaire. (1) En attendant, les autorités sanitaires françaises se disent extrêmement vigilantes par rapport au risque d’importation de souches de poliovirus sauvages ou dérivées du vaccin oral.