Des opioïdes sans effets indésirables, c’est possible ?
- Cong X & al.
- Mol Cell
- Agnès Lara
- Résumé d’articles
À retenir
- L’analyse des modifications conformationnelles induites par différents agonistes du récepteur opioïde-µ montrent que certains d’entre eux, dits biaisés, sont capables d’activer la voie de signalisation des protéines G et d’inhiber la voie de la ß-arrestine que l’on sait impliquée dans la production des effets indésirables des opioïdes.
- Ces résultats sont importants car « ils pourraient permettre à terme de développer des nouvelles molécules plus ciblées, activant seulement les voies qui nous intéressent, sans effets secondaires » a rapporté Rémy Sournier, l’un des codirigeants de l’étude.
Alors que l’addiction aux opioïdes est à l’origine de nombreux décès aux États-Unis et qu’elle suscite de l’inquiétude en Europe, des chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de l’Institut de Génomique Fonctionnelle à Montpellier se sont intéressés à la principale cible des analgésiques opioïdes, le récepteur opioïde-µ. Ils ont plus précisément exploré les mécanismes associés à la fixation de différents agonistes et à leur effet sur l’activation des voies de signalisation en aval de ce récepteur. Il ne s’agit pas d’un simple bouton on/off, mais de l’adoption d’états de conformation tridimensionnelle susceptibles d’activer différemment les cascades de signalisation intracellulaire en aval, et ce de façon spécifique en fonction du ligand/agoniste fixé sur le récepteur. On parle d’agonisme biaisé ou de spécificité fonctionnelle du récepteur à un ligand donné. Autrement dit un ligand biaisé induit une dynamique conformationnelle particulière dans la structure du récepteur, qui elle-même active ou inhibe une voie de signalisation intracellulaire plutôt qu’une autre. Le décryptage de ces mécanismes pourrait permettre d’identifier des agonistes spécifiques capables de séparer l’effet analgésique des opioïdes, de leurs effets indésirables. Il devient possible depuis peu grâce au développement des techniques de spectroscopie RMN.
Méthodologie
À partir d’études pharmacologiques sur des cellules en culture, les chercheurs ont comparé les changements de conformation tridimensionnelle induites par des agonistes biaisés et non biaisés du récepteur opioïde-µ, capables d’activer les protéines G couplées à ce récepteur, ainsi que la voie de la ß-arrestine associée à la plupart des effets indésirables des opioïdes. Puis ils ont analysé, par spectroscopie RMN et modèles informatiques de simulation, la façon dont la fixation de ces différents agonistes modifiaient la conformation du récepteur opioïde-µ et notamment du domaine intracellulaire couplé aux protéines G et à la voie de la ß-arrestine.
Résultats
Les résultats de ces expériences montrent que les ligands biaisés (c’est-à-dire capable d’activer une voie spécifique de signalisation) comme l’oligocérine ou le PZM21, se fixent plus profondément sur le récepteur par rapport à des agonistes non biaisés comme le DAMGO ou le BU72, sur la partie « connecteur » du récepteur située à l’articulation entre le domaine extramembranaire de fixation du ligand et le domaine intracellulaire responsable de l’activation des voies de signalisation. Ils provoquent ainsi un changement conformationnel au niveau du segment transmembranaire 7, de la boucle intracellulaire 1 et de la 8e structure en hélice du domaine intracellulaire. Et cela leur permet de découpler l’activation des voies de signalisation associées à ce domaine intracellulaire du récepteur, en activant la voie des protéines G et en inhibant celle de la ß-arrestine.
Le modèle mis au point pour ces travaux pourra également servir à identifier de nouveaux agonistes biaisés du récepteur opioïde-µ.
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