Dans quelles pathologies prescrire l’activité physique en complément d’un traitement ?

  • Nathalie Barrès
  • Résumé d’article
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Le groupe d’expertise collective de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) recommande la prescription systématique d’une activité physique adaptée (APA) en complément d’un traitement médical en cas de cancer, maladie coronaire, insuffisance cardiaque chronique, accident vasculaire cérébral, broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), asthme, pathologie ostéo-articulaire, dépression et schizophrénie. L’APA doit être personnalisée à partir de tests d’évaluation réalisés en amont de son initiation. 

  • Maladie coronaire. L’activité physique (AP) est recommandée le plus précocement possible. Elle consistera en des exercices intermittents à haut niveau d’intensité (EIHI) entrecoupés de périodes d’effort de plus faible intensité ou de repos ou en des exercices d’intensité modérée. Si les bénéfices entre ces 2 programmes semblent être équivalents, en revanche, les seconds sont plus adaptés aux sujets fragiles et fatigables. 
  • Insuffisance cardiaque chronique. L’APA est recommandée chez tous les patients quel que soit le degré de sévérité de la pathologie. Le port d’un simulateur, d’un défibrillateur cardiaque, l’usage d’une assistance circulatoire ou un antécédent de transplantation ne la contre-indiquent pas. Elle doit être progressive et réalisée en structure spécialisée ou à domicile après une éducation spécifique. L'entraînement fractionné a montré le plus de bénéfices. L’AP devra être poursuivie tout au long de la vie à raison de 30 minutes d’activité modérée à vigoureuse au moins 5 fois par semaine. 
  • AVC. L’APA fait partie du traitement optimal des patients post-AVC. Son initiation est sûre, même initiée dès les 24 à 72 premières heures post-AVC, quitte à envisager une mobilisation passive initialement. L’association entraînement aérobie et renforcement musculaire offre les meilleurs bénéfices. Dans ce contexte l’objectif de l’APA est double : limiter le retentissement des séquelles de l’appareil locomoteur et/ou cognitives et prévenir une récidive. Le réentraînement sera progressif, 3 à 5 séances par semaine de 20 à 60 minutes, et personnalisé en fonction des séquelles. Le réentraînement des patients les plus sévères doit se faire en centre spécialisé et sous surveillance cardiovasculaire stricte. La surveillance devra de toutes les façons être adaptée au niveau de risque de chaque patient avec une attention spécifique aux sujets ayant eu un AVC d’origine hémorragique. 
  • Cancer. Un déconditionnement physique est très fréquemment constaté après un diagnostic de cancer. Il est à l’origine d’une fatigue importante et d’une diminution de la qualité de vie. Il est accentué par la réduction de l’activité physique et par l’augmentation de la sédentarité. Les preuves s’accumulent sur les bénéfices de l’AP dans la prise en charge des sujets traités pour cancer notamment sur la fatigue, la qualité de vie, les capacités cardio-respiratoires, la composition corporelle, l’anxiété, les symptômes dépressifs. Certaines études menées spécifiquement sur certains cancers (sein, côlon, prostate) indiquent un impact positif sur la réduction de la mortalité globale et spécifique et du risque de récidive. L’AP doit être prescrite le plus tôt possible post-diagnostic, concomitamment aux traitements et poursuivie post-traitement. L’AP doit être adaptée à l’évolution clinique du patient et aux comorbidités. En dehors de limitations (anémie prononcée, suites post-chirurgicales, lésions osseuses, …) une activité physique modérée à intense, régulière et progressive d’au moins 30 minutes/jour, cinq fois par semaine est indiquée, de préférence dans un programme supervisé ou semi-supervisé. La combinaison d’activités en aérobie et de renforcement musculaire est préconisée, avec une augmentation progressive de la durée et de l’intensité.
  • BPCO. Chez les patients atteints de BPCO, l’instauration d’une AP est un élément fondamental pour améliorer la qualité de vie, la tolérance à l’effort, réduire la dyspnée et les exacerbations, diminuer les hospitalisations et améliorer la survie des patients. Elle doit être recommandée de manière systématique en complément de la prise en charge médicamenteuse après évaluation des capacités physiques et de la tolérance à l’effort de l’individu. Une combinaison d’activités variées et ludiques sont à privilégier. Les entraînements d’endurance ou fractionné offrent des effets comparables. Les exercices de renforcement musculaire sont utiles pour améliorer la tolérance générale à l’effort et la force musculaire. 
  • Asthme. Les exercices d’endurance sont particulièrement bénéfiques car ils augmentent la bronchodilatation, les capacités et la tolérance à l’exercice et diminuent l’hyperactivité bronchique et le nombre de jours sans symptôme. Le patient y gagne en qualité de vie. Le groupe d’expertise collective Inserm recommande une instauration systématique et précoce de l’APA chez les patients asthmatiques et insiste sur la poursuite à long terme de l’APA. Pas d’indication spécifique sur l’intensité optimale par manque de données encore sur le sujet.
  • Pathologies ostéo-articulaires. L’APA est recommandée quels que soient le stade, l’activité et la sévérité de la maladie, et doit être initiée le plus précocement possible. Les preuves sont importantes dans la réduction de la douleur, de la limitation des activités dans la lombalgie chronique, l’arthrose des membres inférieurs, la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante. Elles le sont moins pour la cervicalgie chronique, le canal lombaire étroit, l’arthrose digitale et les connectivites. Les modalités optimales de ces programmes restent à définir précisément.
  • Dépression. Les données de la littérature montrent que l’APA aurait des bénéfices rivalisant avec ceux des traitements antidépresseurs. Les effets sont multiples : meilleure oxygénation cérébrale, régulation et libération du cortisol et de la sérotonine, stimulation des endorphines, facilitation des circuits de la récompense, modification des niveaux de conscience, distraction, diversion des pensées négatives, amélioration de l’estime de soi et des liens sociaux, … Pour cela, un minimum de trois séances par semaine d’activités mixtes est requis. L’APA doit être prescrite en première intention en cas de dépression d’intensité légère à modérée. Pour des dépressions sévères, elle devra être associée à des traitements médicamenteux, psychothérapeutiques et à un soutien psychiatrique.
  • Schizophrénie. Les études peinent à montrer une amélioration des fonctions exécutives, de la vitesse de traitement et de la mémoire chez les sujets schizophrènes pratiquant une APA. En revanche, elle permettrait de diminuer les hallucinations, l’anxiété et la détresse psychologique. Des exercices physiques adaptés et structurés doivent être recommandés dans ce contexte clinique car le patient y gagne en qualité de vie et en attention. Comme pour les autres pathologies, elle doit être initiée précocement et maintenue le plus durablement possible.