Dépistage du cancer colorectal : faut-il aller au-delà de 75 ans ?
- Nathalie BARRÈS
- Résumé d’article
À retenir
La Société Française d’Onco-Gériatrie (SOFOG) et la Fédération Francophone de Cancérologie Digestive (FFCD) ont réalisé une revue de la littérature dans le but d’établir des recommandations sur le dépistage du cancer colorectal (CCR) chez les sujets de plus de 75 ans. Les points essentiels qui en ressortent sont les suivants :
- Il est essentiel de remédier au manque de données scientifiques sur le sujet.
- L’augmentation de la participation de la population des 50-74 ans au dépistage organisé est la priorité, sachant qu’en France le taux de participation n’était que de 35% en 2020-2021 !
- La poursuite du dépistage après 75 ans ne doit pas être systématisée compte tenu des risques inhérents à la coloscopie et à l’anesthésie avec l’avancée en âge.
- Pour contrer les difficultés d’identification des personnes de 75-80 ans susceptibles d’en être bénéficiaires, les auteurs proposent que les médecins généralistes sélectionnent les individus qui répondent aux critères de dépistage.
- Il est par ailleurs nécessaire de guider les médecins généralistes dans ce rôle.
Pourquoi est-ce important ?
En France, les individus de 50 à 74 ans sont invités à participer au dépistage du CCR. Les sujets les plus à risque ou ayant des antécédents d’adénome bénéficient d’une surveillance spécifique en dehors du dépistage organisé. Cependant, l’âge médian au diagnostic de CCR est de 73 et 71 ans, pour les femmes et les hommes respectivement. Et, au global, la moitié des cas de CCR surviennent après 75 ans chez les femmes et 40% chez les hommes. En France, l’espérance de vie à 75 ans est de 14,8 ans et 12 ans pour les femmes et les hommes respectivement. Il semble donc intéressant de rediscuter de l’intérêt du dépistage du CCR à 75 ans et plus.
Méthodologie
Cette revue systématique de la littérature réalisée en octobre 2021 par la SOFOG et la FFCD a pour objectif de faire le point sur l’état actuel des connaissances concernant le dépistage du CCR dans le but d’établir des recommandations. Des recherches complémentaires ont été réalisées pour identifier des articles concernant l’acceptabilité, l’efficacité et les inconvénients liés à ce dépistage. Les recommandations internationales ont également été considérées.
Principaux résultats
Au total, 249 articles ont été identifiés. Les études portant sur les systèmes privés soulignent que le dépistage est prolongé jusqu’à 80-85 ans en fonction de l’espérance de vie et des antécédents de dépistage.
Les deux Sociétés Savantes Françaises à l’initiative de cette publication soulignent le manque de données dans la littérature au sujet du dépistage du CCR chez les sujets âgés. La plupart des données proviennent par ailleurs de simulations. Les rares données disponibles portent sur un dépistage par coloscopie dans des systèmes de soins comme celui des États-Unis, donc non cohérent par rapport au modèle français. La plupart des recommandations, en particulier dans les pays à organisme de santé payeur unique, et bénéficiant d’un dépistage organisé, ont fixé un âge limite pour ce dépistage à 75 ans. En revanche, il n’est pas rare dans les systèmes de santé privé de voir proposer le dépistage – avec décision laissée à l’individu – jusqu’à 80 ans voire 85 ans. Si certaines revues concluent qu’il n’y a pas suffisamment de données dans la littérature pour recommander le dépistage systématique après 74 ans, d’autres évoquent qu’il y a probablement un bénéfice pour les personnes qui n’auraient jamais été dépistées ou qui ont une espérance de vie d’au moins 7 à 10 ans. Les bénéfices diminueraient avec l’avancée en âge pour devenir nuls à partir de 90 ans pour les femmes et 85 ans pour les hommes. La SOFOG et la FFCD proposent d’évaluer l’introduction du dépistage du cancer colorectal chez les 75-80 ans en France et d’inclure le médecin généraliste dans le recrutement des patients éligibles à ce dépistage. Celui-ci devra tenir compte des effets indésirables de la coloscopie et leur impact sur la balance bénéfice/risque. En effet, les risques de perforation intestinale et de saignement sont doublés après 75 ans, et les risques liés à l’anesthésie sont fortement augmentés par rapport aux 70-74 ans.
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