CPLF 2022 – Covid-19 : évolution de la prévention des évènements thromboemboliques veineux (ETEV)
- Caroline Guignot
- Actualités Congrès
Les ETEV ont été fréquents dès le début de la pandémie, ce qui a justifié d’importants travaux visant à améliorer les procédures diagnostiques et préventives. Le professeur Olivier Sanchez (HEGP, Paris) en a présenté une synthèse.
Dès la première vague de Covid-19, les évènements thromboemboliques ont été particulièrement nombreux. Une méta-analyse [1], conduite rapidement à partir des premières données (issues d’études très disparates), avait établi le risque à 17%, dont 12% de phlébites et 7% d’embolies pulmonaires. En réalité, les vagues suivantes ont -heureusement - montré des chiffres plus faibles : l’étude française menée par Santé Publique France est en cela particulièrement intéressante car elle dresse un bilan national et exhaustif de toute l’année 2020 [2]. Ainsi, ce travail rapporte 12,9% d’évènement thromboembolique (ETEV) et 8,8% d’embolie pulmonaire (EP) parmi les 287.638 cas de Covid-19 hospitalisés en 2020. Ceux qui avaient présenté une complication thromboembolique étaient plus souvent des hommes, légèrement plus âgés et qui avaient plus souvent des comorbidités par rapport aux autres. Cette étude a montré notamment que les sujets ayant eu une EP avaient une durée de séjour plus longue et étaient plus souvent admis en réanimation que les autres. Enfin, après ajustement sur les facteurs de confusion, l’EP apparaissait associée à une augmentation de la mortalité hospitalière en réanimation mais pas en hospitalisation conventionnelle, et uniquement au cours de la première vague. Il est possible que l’optimisation des protocoles de prise en charge des cas Covid (dexaméthasone, biothérapies…) ait permis de juguler une partie du risque associé.
Des questions persistent sur la place des D-dimères et le protocole de prévention
Le diagnostic d’ETEV dans le contexte Covid-19 peut être difficile car leurs symptomatologies peuvent se confondre. Comme dans le cadre général hors pandémie, la suspicion clinique -par exemple devant une aggravation - doit rester le premier pilier de la décision d’investigation, avec l’angioscanner en premier lieu : il permet à la fois d’évaluer l’atteinte du parenchyme et l’état vasculaire. Le taux de D-dimères, qui est normalement utilisé pour sa valeur d’exclusion dans le cadre habituel, a fait l’objet de nombreux travaux au cours de la pandémie qui visaient à évaluer si un taux très élevé peut aider à pronostiquer l’ETEV. Pour l’heure, les données ne sont pas suffisamment solides pour le justifier clairement.
Sur le plan de la prise en charge, le traitement par anticoagulant repose sur les héparines de bas poids moléculaire en première intention, les anticoagulants oraux directs étant plus volontiers réservés aux patients stabilisés, a fortiori avant leur sortie. La durée de traitement reste limitée à 3 ou 6 mois puisque le Covid-19 est un facteur de risque transitoire, à moins qu’un facteur favorisant permanent coexiste. La thrombolyse est réservée aux patients les plus graves en état de choc, à condition que l’EP elle-même justifie le geste (et non uniquement la sévérité du Covid-19).
Finalement, si un gros travail d’optimisation a été conduit sur le sujet, la situation reste floue quant à l’efficacité de protocoles de prévention des ETEV, à doses curatives ou à demi-doses thérapeutiques. Le recul sur les données accumulées depuis le début de la pandémie permet de statuer sur un seul élément : il n’est pas recommandé d’utiliser des doses curatives en prophylaxie chez les sujets admis en réanimation. Chez les patients en hospitalisation conventionnelle, les données sont mitigées, et suggèrent peu ou pas d’effet de la dose thérapeutique, avec pour certaines études, un risque hémorragique associé. Les posologies intermédiaires ont été peu étudiées et ne suggèrent pas d’intérêt spécifique. Sur le sujet, des travaux plus aboutis sont attendus. Les données de l’étude française COVI-DOSE seront en cela très intéressantes : conduite chez un millier de patients, cette étude devrait bientôt aider à établir la posologie la plus adaptée à la prévention des évènements, sans sur-risque hémorragique.
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