COVID-19 : les animaux d’élevage représentent-ils un risque pour l’Homme ?

  • Fanny Le Brun
  • Actualités Médicales
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Alors que l’on soupçonne une origine animale du SARS-CoV-2 (recombinaison de virus infectant les chauve-souris et les pangolins) et que de nombreux foyers de contamination sont identifiés dans les abattoirs, que sait-on du risque de transmission du COVID-19 à l’Homme par les animaux d’élevage ?

Quels animaux sont à risque ?

Le SARS-CoV-2 entre dans les cellules en se fixant au récepteur ACE2. Un article publié en mars dernier (Qiu et al. 2020) a montré que certaines espèces animales, comme le porc et la civette, disposent de ce récepteur cellulaire et sont donc susceptibles d’être infectées. Les félidés, quant à eux, ont un récepteur différent mais proche de celui utilisé par le virus tandis que les rongeurs ont des récepteurs très différents et ne sont probablement pas sensibles à ce virus. Cette étude apporte de premiers éléments mais la présence du récepteur n’est pas suffisante pour qu’un animal puisse être infecté par le SARS-CoV-2. D’autres facteurs cellulaires sont nécessaires pour la reproduction du virus.

D’autres études se sont basées sur l’inoculation expérimentale du virus à des animaux ou sur la mise en évidence d’infections naturelles chez certaines espèces. Il en ressort que :

  • Les porcs ne semblent pas sensibles à une infection par le SARS-CoV-2, malgré la présence du récepteur ACE2 sur leurs cellules. En effet, lorsque ces animaux sont infectés par voie nasale et suivis pendant 40 jours, on ne retrouve ni virus dans les prélèvements nasopharyngés, ni signes cliniques, ni séroconversion.
  • Les volailles (poulets et canards) semblent également insensibles au SARS-CoV-2 lorsque ce virus leur est inoculé.
  • Les bovins, ovins et caprins ne semblent pas sensibles au SARS-CoV-2 si l’on se réfère aux analyses des récepteurs au virus chez ces espèces, à l’incapacité de leurs lignées cellulaires à être infectées in vitro par le SARS-CoV-2 et à l’absence de foyer épidémique chez ces espèces. Cependant, il faut attendre les résultats des études expérimentales d’inoculations in vivo qui sont en cours.
  • Les chevaux n’ont pas fait l’objet d’étude expérimentale mais aucun cas d’infection naturelle n’a été rapporté et aucune sérologie positive n’a été retrouvée chez ces animaux, ce qui laisse penser qu’ils ne seraient probablement pas sensibles à ce virus.
  • Les mustélidés comme les visons et les furets sont sensibles au SARS-CoV-2 et développent des signes cliniques proches de ceux que l’on retrouve chez l’Homme. Dans un élevage de visons aux Pays Bas où des cas d’infection au SARS-CoV-2 ont été détectés, le virus (non viable) a également été retrouvé chez les chats de la ferme et un cas très probable de contamination de l’Homme par les visons a été rapporté le 20 mai. C’est actuellement le seul cas humain de COVID-19 pour lequel une origine animale est suspectée.

Y a-t-il un risque de contamination dans les abattoirs ?

Comme nous venons de le voir, parmi les animaux d’élevage, seules certaines espèces de mustélidés semblent sensibles au SARS-CoV-2. Pourtant, de nombreux foyers de COVID-19 ont été mis en évidence dans les abattoirs, en France mais aussi dans le monde entier. D’après les études épidémiologiques menées dans ces abattoirs, l’introduction du virus serait liée à une personne contaminée et non à un animal. La multiplication de ces foyers peut s’expliquer par plusieurs éléments : les employés des abattoirs ont dû continuer à travailler malgré le confinement, le risque de contamination y est élevé à cause des conditions de travail (locaux exigus) et du risque de dispersion du virus lors du nettoyage à haute pression. De nouvelles mesures de protection et un dépistage régulier du personnel devraient permettre de limiter la survenue de ces foyers.

Si le personnel des abattoirs ne semble pas pouvoir être contaminé par la viande, l’inverse n’est pas exclu. En effet, il est théoriquement possible qu’une personne infectée puisse contaminer la viande via des gouttelettes de salive. Reste à savoir si la consommation de cette viande est à risque… À l’heure actuelle, la transmission du SARS-CoV-2 par voie digestive n’a pas été démontrée et une cuisson à 63°C pendant 4 minutes est considérée comme efficace pour inactiver les coronavirus dans les aliments : la voie de transmission par la viande est donc peu probable.