COVID-19: bilan « très alarmant » dans 3 hôpitaux de Polynésie française

  • Vincent Richeux

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales par Medscape
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Avec un taux d’incidence passé en un mois de 10 cas à plus de 1.500 cas pour 100.000 habitants, la progression de l’épidémie de Covid-19 en Polynésie française est fulgurante. Pour éviter une saturation des services hospitaliers, des mesures plus strictes sont appliquées depuis le 11 août (confinement le dimanche à Tahiti et Moorea, contrôle renforcé des déplacements entre les îles, couvre-feu…) et du personnel paramédical a été envoyé en renfort depuis la métropole.

En Polynésie, « nous avons une accélération très rapide du nombre de cas. Jamais nous n’avons connu une telle situation, y compris à l’automne dernier. Nous suivons cette situation heure par heure », affirme Dominique Sorain, haut-commissaire de la République en Polynésie française, dans une allocution publiée mercredi dernier, annonçant le renforcement des mesures sanitaires.

Le virus présent sur 24 îles

A l’automne dernier, lorsque des mesures avaient été prises pour contenir une flambée épidémique, on comptait dans les îles de Polynésie 939 cas actifs. Actuellement, on en recense 4.269, majoritairement sur Tahiti et Moorea, une île adjacente, mais aussi dans les autres archipels (archipels de Tuamotu et de Gambier, îles de Rapa, Huahine, Raiatea,…), distantes de plusieurs centaines de kilomètres.

« Nous devons éviter que les chaînes de contamination continuent à se former dans des îles qui sont, par définition, vulnérables du fait de leur éloignement des structures de santé », poursuit le haut-commissaire. « Il y a des îles qui sont démunies de structures de santé permettant d’accueillir des personnes malades », ce qui se traduit par des évacuations sanitaires en avion vers Tahiti, qui peuvent être difficilement multipliées.

La situation est particulièrement inquiétante dans ce territoire vaste comme l’Europe composé de 118 îles, dont la moitié sont habitées. Selon le dernier bilan hebdomadaire, le virus circule actuellement sur 24 îles. Le taux de positivité des tests de dépistage s’élève à plus de 25% et l’incidence des infections atteint 1.315 cas sur 100.000 habitants sur sept jours. Au 11 août 2021, on compte plus de 1.500 cas sur 100.000 habitants.

 

L’accès aux plages interdit

En tenant compte de ces indicateurs, la Polynésie se place au niveau des îles des Antilles, qui affrontent en ce moment une situation extrêmement tendue (voir encadré). En Guadeloupe, le taux de positivité est également de 25%, mais l’incidence atteint un record de 1.843 cas pour 100.000 habitants, contre 236 cas pour 100.000 habitants en moyenne nationale.

Concernant les hospitalisations pour Covid-19, même si les services ne sont pas encore saturés comme en Martinique, le bilan est jugé « très alarmant » dans les trois hôpitaux de Polynésie française. Selon la direction de la santé de Polynésie française (DSP), au 11 août, on comptait 198 hospitalisations, dont 28 en réanimation.

A la date du 12 août 2021, sur la totalité des 490 lits du centre hospitalier (CH) de Polynésie française, 174 lits sont occupés par les patients Covid, soit un taux d'occupation de 35,5%, a indiqué l’établissement auprès de Medscape édition française. Au CH de Moorea, l’île la plus proche, 9 patients Covid sont hospitalisés, tandis que le CH de Ralatea, situé à 210 kilomètres de Tahiti, accueille 16 patients.

Pour soulager les services hospitaliers et éviter la saturation, des mesures plus strictes sont appliquées depuis mercredi dernier. En plus d’un couvre-feu fixé à 21h sur tout le territoire, il a été décidé de mettre en place un confinement à Tahiti et Moorea, uniquement le dimanche. L’accès aux plages sera interdit. Ce confinement pourrait être élargi aux autres jours de la semaine, selon l’évolution de la situation, a précisé Dominique Sorain.

 

Un taux de vaccination insuffisant

En Polynésie française, 28,5% de la population a reçu le schéma vaccinal complet, selon le dernier bilan hebdomadaire de la DGP. Un niveau trop faible pour avoir un impact notable sur la circulation du virus, mais qui surpasse le taux de vaccination observé en Martinique, où seuls 18,5% de la population de 12 ans et plus a reçu les deux doses. Un taux proche de celui observé en Guadeloupe.

« Le principal défi est de convaincre la population de se faire vacciner », a souligné Dominique Sorain, qui évoque des « réticences culturelles ». D’ici la fin du mois d’août, 14.000 doses de vaccin Pfizer vont venir s’ajouter aux 70.000 doses Janssen et Pfizer encore disponibles. « De quoi vacciner à grande échelle », précise le haut-commissaire.

 

Envoi de 12 infirmier.e.s à Tahiti

Afin de mieux protéger les îles des cinq archipels que compte la Polynésie française, un dispositif sera mis en place pour conditionner un voyage au départ de Tahiti « à la production soit d’une preuve de vaccination, soit d’un test négatif », autant sur un vol domestique que sur un navire. Ce « système d’autorisation pour se rendre dans les îles » pourrait être remplacé par le pass sanitaire.

Les contrôles à l’arrivée des frontières sont par ailleurs maintenus. Une personne non vaccinée désirant effectuer un voyage à destination de la Polynésie française doit le justifier par un motif impérieux et se mettre en quarantaine pendant 10 jours. Les personnes vaccinées doivent présenter un test PCR ou antigénique négatif avant l’embarquement en avion.

Enfin, 12 infirmier.e.s disposant d’une expérience en réanimation partiront dimanche 15 août depuis la métropole vers Papeete pour renforcer les équipes soignantes du système hospitalier polynésien, a indiqué le ministère de la Santé. Des renforts en personnel soignant ont également été demandés par les autorités locales à la Nouvelle-Calédonie.

Du matériel va également être transféré depuis la métropole. L’objectif est notamment d’améliorer la capacité de dépistage en envoyant plus de 10 000 écouvillons et 32 000 tests.

 

Les Antilles submergées par l’épidémie

Aux Antilles, l’épidémie continue sa progression, surtout en Guadeloupe, qui affiche désormais une incidence de 1.843 cas pour 100.000 habitants, soit plus du double par rapport à la semaine précédente, selon les dernière données de l’Agence régionale de santé (ARS) de Guadeloupe. Un taux jamais atteint en France depuis le début de l’épidémie.

En une semaine, dans les deux centres hospitaliers de Guadeloupe qui ont déclenché leur plan blanc, on a recensé 124 nouvelles hospitalisations Covid et 33 nouvelles admissions en réanimation. Au total, 53 patients sont en réanimation pour une aggravation de leurs symptômes (pour 67 lits disponibles contre 27 en temps normal). Cette semaine, 17 patients sont décédés du Covid-19.

En Martinique, où l’Armée a déployé du personnel médical pour venir en aide aux équipes du CHU, les services hospitaliers sont saturés. On compte, au 12 août, 360 hospitalisations pour Covid, dont 54 en réanimation où il n’y a plus de lits de disponible. Depuis mi-juillet, l’île déplore 86 décès liés au Covid-19.

Conséquence de cette crise sans précédent: un confinement strict, actuellement en vigueur en Martinique, est également décrété à partir de ce vendredi en Guadeloupe pour trois semaines minimum, en plus d’un couvre-feu à 20h. Un renfort supplémentaire de 274 soignants et de 60 pompiers est arrivé depuis la métropole pour assister les équipes médicales de Guadeloupe et de Martinique.

Cet article a initialement été publié sur le site internet Medscape.