Comment diminuer les inégalités territoriales de l’accès aux soins

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
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Il s’en faut de beaucoup que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat soit la première à s’alarmer des inégalités territoriales d’accès aux soins et de leur aggravation dans les années qui viennent. L’intérêt de son rapport d’information n’est donc pas dans le constat fait, mais dans ses recommandations, faites à l’unanimité de ses membres, appartenant à un large éventail du spectre politique français. Elles ne sont pas nouvelles, mais leur ensemble a le mérite de la cohérence.

Libérer du temps médical

Elles commencent par une pétition de principe, le soutien à l’exercice libéral, en relevant les honoraires de consultation des médecins généralistes de secteur 1 à 30 euros, sans augmentation du reste à charge pour les patients, et en favorisant le cumul emploi-retraite par l’exonération des cotisations retraite dans les zones sous-denses des médecins retraités.

Afin de libérer du temps médical, les sénateurs proposent également de permettre le recrutement d’un assistant médical pour un ou plusieurs praticiens dans les territoires sous-dotés, de créer le statut d’infirmier en pratique avancée praticien et d’une manière générale d’accroître « les gestes médicaux prodigués par d’autres professionnels avec des protocoles sécurisés. »

Les sénateurs se prononcent pour un soutien ferme à la télémédecine, en garantissant le remboursement sans condition par l’Assurance Maladie des téléconsultations pour les patients résidant en zone d’intervention prioritaire et en encourageant le déploiement de bornes de téléconsultation avec accompagnement par un professionnel de santé.

Cibler les zones sous-denses

Ils distinguent deux types de zones sous-denses :

  • Les zones d’intervention prioritaire, les plus fragiles, concernant 30,2% des Français : les médecins doivent y être « éligibles aux aides conventionnelles et aux exonérations fiscales. »

  • Les zones fragiles sans être préoccupantes, concernant 42% des Français : les médecins doivent y être éligibles aux aides des ARS (Agences régionales de santé) et des collectivités territoriales.

Deux propositions ne manqueront pas de faire débat :

  • Dans les zones sur-dotées, conditionner l’installation à la cessation d’activité d’un médecin exerçant la même spécialité.

  • Dans les zones sous-dotées, instaurer un conventionnement sélectif temporaire.

Les sénateurs recommandent l’instauration d’un Conseil national d’orientation de l’accès territorial aux soins et des commissions départementales de la démographie médicale. Pour eux, il convient d’évaluer les dispositifs d’incitation à l’installation, notamment les aides financières, qui n’ont pas prouvé leur efficacité, et de favoriser la création de guichets uniques pour les territoires.

Pour une 4ème année de formation en médecine générale

Parce que « les terrains de stage constituent des opportunités pour favoriser la découverte des territoires sous-denses, les incitations au choix d’un stage sont stratégiques. » Il s’agirait de majorer de 30% les honoraires pédagogiques des maîtres de stage des universités dans les zones sous-denses et de revaloriser les indemnités de transport des étudiants.

Les sénateurs se prononcent fermement pour la création d’une 4ème année de troisième cycle pour la médecine générale « qui permettrait l’arrivée de 3.900 médecins juniors, prioritairement dans les zones sous-denses » et pour élever de 40 à 50% le nombre de places dédiées à l’internat pour la médecine générale.

Pour les zones sous-denses, ils proposent pour les médecins concernés de majorer leur aide au bénéfice, de défiscaliser les permanences de soins et de majorer les droits à retraite au terme de 3 à 5 ans d’exercice dans une zone d’intervention prioritaire.

Pour les sénateurs, il faut augmenter le nombre des professionnels de santé, médecins, infirmiers et sages-femmes, et « envisager de faire entrer à l’Université le cursus de masso-kinésithérapie. » Il faut également diversifier l’origine sociale et géographique des étudiants en médecine par un système d’accompagnement et de bourses pour les étudiants issus de zones sous-denses.

Associer les collectivités territoriales

Les sénateurs concluent en constatant qu’en ce qui concerne les inégalités territoriales d’accès aux soins, « ni l’engagement du législateur ni la parole de l’État ne sont respectés. » Ils proposent de renforcer les moyens juridiques et financiers des collectivités territoriales pour mieux associer les élus dans l’organisation de la proximité des soins, dans une logique de subsidiarité.