Chirurgie d’affirmation de genre : féminisation et bien-être sexuel

  • Özer M & al.
  • Sex Med

  • Nathalie Barrès
  • Résumé d’article
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À retenir

Sous l’égide de la Société européenne de médecine sexuelle, un groupe d’experts a émis des recommandations pour la pratique des chirurgies d’affirmation de genre (CAG) féminisantes.

Toutes ces techniques ne bénéficient pas d’un recul équivalent sur le bien-être sexuel post-opératoire perçu par le patient.

 

Orchidectomie seule 

Chez une personne assignée au sexe masculin à la naissance et en demande de transition de genre, le groupe de travail conseille au chirurgien spécialiste du genre :

  • d’envisager l’orchidectomie seule comme une option chirurgicale viable (niveau IV, grade D) ;
  • d’informer le sujet demandeur sur les effets attendus sur le bien-être sexuel de cet acte avant l’intervention (niveau II, grade D).

Des taux de testostérone inférieurs à 20 ng/dL (0,7 nmol/L) ont été rapportés chez des patients post-orchidectomie seule. Bien qu’aucune étude ne se soit intéressée au bien-être sexuel des personnes transgenre ayant subi une orchidectomie, il est important que les patients soient informés des effets indésirables potentiels d’un taux faible de testostérone sur leur bien-être sexuel.

 

Vaginoplastie 

La vaginoplastie vise à obtenir un appareil génital esthétique et fonctionnel, avec création d’un vagin, d’une vulve et d’un clitoris. Le groupe d’experts souligne que chez les personnes assignées au sexe masculin à la naissance et en demande de transition de genre, le chirurgien devrait :

  • proposer la technique d’inversion du pénis comme vaginoplastie de choix (niveau IV, grade C) ;
  • être capable de proposer des alternatives à cette technique, comme des greffes de peau ou de segment des intestins en cas de malformations ou de longueur de peau pénienne insuffisante (niveau IV, grade C) ;
  • conseiller une vulvoplastie (ou vaginoplastie à profondeur zéro) lorsque cela est médicalement recommandé ou souhaité par le sujet, afin de réduire les éventuels regrets futurs (niveau IV, grade D) ;
  • informer le sujet sur les résultats sexuels escomptés, les symptômes du plancher pelvien et les complications possibles (niveau IV, grade D).

Plusieurs études ont évalué le bien-être sexuel après vaginoplastie. Il a été constaté que les sensations orgasmiques et génitales étaient conservées chez tous les sujets. L’excitation subjective et le désir ont été ressentis chez une majorité (79,1% des individus). L’orgasme lui, pouvait être atteint chez 70% par la masturbation ou les rapports sexuels (les autres personnes ne pouvaient pas avoir cette sensation, n’avaient pas essayé ou avaient répondu « sans objet » selon les mêmes proportions, environ 10%). Certaines études ont fait état d’un dysfonctionnement sexuel. Un tiers des sujets ont évoqué ressentir des douleurs à la pénétration, et autant ont rapporté être incapables d’avoir des rapports vaginaux réceptifs du fait d’une largeur ou profondeur vaginale insuffisante.

 

Augmentation mammaire

Une augmentation mammaire peut être obtenue par hormonothérapie féminisante, mais elle peut se révéler insuffisante. La CAG contribue alors à augmenter le sentiment de féminité, le bien-être psychosocial et sexuel. Le groupe d’experts conseille aux chirurgiens spécialistes du genre de :

  • réaliser une augmentation mammaire au moins 12 mois après la fin d’un traitement par hormonothérapie (niveau III, grade C) ;
  • envisager la greffe de graisse comme une alternative ou un complément à l’utilisation d’implants (niveau IV, grade C) ;
  • d’informer les sujets demandeurs des risques associés à l’utilisation d’implants (niveau III, grade B).

Une étude a fait état d’une augmentation significative du bien-être sexuel quatre mois après augmentation mammaire dans ce contexte.

 

Féminisation de la voix

La consultation d’un chirurgien ORL est recommandée avant traitement orthophonique afin d’exclure toute anomalie de l’anatomie et du fonctionnement des cordes vocales. Les résultats chirurgicaux sont imprévisibles. Le groupe d’experts souligne que le chirurgien oto-rhino-laryngologiste, devrait envisager une chirurgie de féminisation vocale après résultats insuffisants des traitements par des orthophonistes (niveau IV, grade D).

Aucune donnée n’est disponible sur le bien-être sexuel après chirurgie de féminisation vocale. 

 

Chirurgie de féminisation faciale

Obtenir une structure faciale osseuse féminine tout en conservant des attributs secondaires masculins, c’est aller à l’encontre des souhaits de la patiente. Les aspects faciaux secondaires ou non squelettiques (ligne des cheveux, poils du visage, texture de la peau, distribution et volumes des graisses) peuvent être impactés par l’hormonothérapie. Il est préférable de traiter les aspects secondaires au moins 12 mois avant une opération chirurgicale. Le groupe d’experts recommande aux chirurgiens spécialistes du genre de :

  • traiter les aspects faciaux secondaires avant de commencer une CAG faciale structurelle (niveau IV, grade C) ;
  • procéder à des ajustements du complexe fronto-nasal-orbitaire, du nez, de la mâchoire inférieure et du cartilage thyroïdien lors d’une chirurgie de féminisation faciale (niveau IV, grade C).

Aucune étude ne s’est intéressée à l’impact d’une chirurgie de féminisation faciale sur le bien-être sexuel dans ce contexte.

 

Limitations

Le niveau de preuve des données actuellement disponibles reste faible et la majorité des questionnaires appliqués pour évaluer le niveau de bien-être sexuel ont été validés pour des femmes et des hommes cis ayant des relations hétérosexuelles.

 

Ce groupe d’experts a également fait une mise au point sur les preuves disponibles concernant la chirurgie d’affirmation du genre masculin et le bien-être sexuel.