Chez les individus sains, l’urine n’est pas stérile
- Serge Cannasse
- Actualités Médicales
Pendant longtemps, on a pensé que l’urine était stérile. Or, expliquent quatre chercheurs espagnols sur le site The Conversation, ça n’est pas vrai. Ce n’est que l’insuffisance des techniques de culture bactérienne qui confortait cette erreur. Aujourd’hui, la génomique, les nouveaux outils de séquençage génétique de masse et le développement du Human Microbiome Project ont changé la donne. Les voies urinaires des individus sains abritent une large communauté microbienne non pathogène.
Si l’exploration de cette faune microbienne en est encore à ses débuts, plusieurs résultats ont néanmoins été obtenus.
Sa composition varie selon le sexe. Chez la femme, le genre bactérien majeur est Lactobacillus (mais il existe aussi chez l’homme), alors que chez l’homme, il s’agit surtout de Corynebacterium et de Streptococcus.
Cette composition varie avec l’âge et le statut hormonal. Ainsi, avec le vieillissement, les Lactobacillus et les Gardanella diminuent, alors que les Mobiluncus, les Oligella et les Porphyromonas prolifèrent.
De nombreuses espèces bactériennes colonisent les voies urinaires, ainsi que le vagin et l’intestin. Des changements dans l’un ou l’autre affectent le microbiote urinaire.
L’altération du microbiote urinaire peut être pathogène
Des travaux récents incriminent davantage une détérioration de ce microbiote que la seule invasion d’un pathogène spécifique dans l’origine des infections urinaires. En particulier, la diminution des Lactobacillus les favoriserait.
Les altérations du microbiote urinaire ont été également mises en cause dans des pathologies comme le carcinome urothélial et le cancer de la prostate. Le mécanisme en serait l’augmentation du nombre de bactéries sécrétant des substances impliquées dans les processus inflammatoires. Par exemple, il a été observé que les bactéries Streptoccus anginosus et Anaerococcus sont souvent impliquées dans des infections urogénitales et sont parfois plus nombreuses dans des échantillons urinaires en cas de cancer.
Même certains problèmes mécaniques, comme l’incontinence urinaire, pourraient être sous l’influence de changements dans le microbiote urinaire. Par exemple, chez les individus sains, son appauvrissement est souvent corrélé avec une augmentation de micro-organismes pathogènes libérant des molécules favorisant la contraction musculaire de la vessie.
Vers des stratégies thérapeutiques alternatives
Ces constats ont de potentielles conséquences thérapeutiques. En effet, la plupart des infections urinaires sont traitées avec des antibiotiques à large spectre. Or, il y a de plus en plus de bactéries résistantes à ces antibiotiques. Il devient donc de plus en plus crucial d’une part, d’identifier précisément les agents pathogènes responsables de ces infections, d’autre part, de développer des traitements alternatifs.
Les probiotiques suscitent un intérêt croissant depuis quelques années. Ainsi, l’administration intravaginale ou orale de certaines souches de Lactobacillus, comme L. crispatus et L. acidophilus, qui aboutit à une colonisation à long terme du microbiote urinaire, ainsi que la transplantation de microbiote fécal et l’utilisation de bactériophages ont réduit la prévalence des infections urinaires chez les sujets concernés, y compris celles à microbes ayant une antibiorésistance importante.
Enfin, l’alimentation semble jouer un rôle important. En particulier, la consommation modérée de produits contenant de la canneberge et d’aliments fermentés riches en probiotiques contribue à préserver l’équilibre bactérien des microbiotes, y compris urinaire.
Les auteurs rappellent qu’il est de plus en plus avéré que ces microbiotes sont une composante essentielle de la santé, parce qu’ils sont une partie essentielle de nous-mêmes : nous abritons plus de micro-organismes que nous n’avons de cellules.
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