Cas clinique : Un homme, Noël et un étrange déficit de mémoire

  • Thomas Kron
  • Actualités Médicales
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À retenir

Une perte de mémoire soudaine sans traumatisme peut être très déstabilisante et également effrayante pour les personnes concernées. Heureusement, il arrive que l'examen neurologique et l'IRM permettent de poser un diagnostic largement rassurant, comme l'illustre l'histoire médicale d'un homme décrite par des neurologues norvégiens.

Le patient et son histoire

Un homme d'âge moyen en bonne santé a raconté aux neurologues des urgences de l'hôpital St. Olav (hôpital universitaire de Trondheim) qu'il était assis dans sa voiture après avoir fait des courses de Noël. Et tout à coup, il se rend compte ne se souvient plus où il a mis les cadeaux qu'il venait d’acheter !

Selon les auteurs, il aurait également raconté qu'il s'était arrêté à plusieurs reprises pour rechercher sur internet via son smartphone "perte de mémoire". Et… il ne se souvenait pas des résultats de sa recherche !

En arrivant chez lui, il n'avait pu se souvenir que de fragments de son parcours de courses et d'un seul cadeau de Noël emballé. Le contenu du paquet, en revanche, était un mystère pour lui.

Constatations et diagnostic

L'examen clinique aux urgences n'a révélé aucun déficit neurologique récent, à l'exception de l'amnésie antérograde.

CT cérébral : sans particularité

EEG : sans signe d'activité épileptique.

IRM cérébrale pondérée par diffusion : lésion de deux millimètres de large dans l'hippocampe caudal gauche.

Les neurologues dirigés par le Dr Sverre Myren ont diagnostiqué une amnésie globale transitoire (AGT).

Discussion

L'amnésie globale transitoire (AGT) est un syndrome de dysfonctionnement hippocampique aigu engendrant une perte soudaine et temporaire de la mémoire (durant quelques heures). Pendant ce temps, aucune nouvelle information ne peut être stockée. En IRM, des défauts de diffusion ponctuels unilatéraux ou bilatéraux dans l'hippocampe peuvent souvent être observés, explique le Dr Daniel Eschle, neurologue suisse de l'hôpital cantonal d'Uri.

Le moment optimal pour détecter ces lésions isolées se situe entre 24 et 72 heures après l'apparition des symptômes.

Les critères de diagnostic, selon le Dr Eschle, sont les suivants :

  • Les épisodes doivent être observés, c'est-à-dire que l'on dispose d'une anamnèse externe fiable.
  • Il doit y avoir une amnésie antérograde claire.
  • Il n'y a pas d'altération de la conscience ou de perte d'identité personnelle ; l'altération cognitive est limitée à l'amnésie.
  • Il n'y a pas de déficits neurologiques somatiques focaux pendant ou après l'épisode.
  • Il n'y a pas de signes de crises d'épilepsie.
  • La durée de l'épisode est limitée à <24 h.

Avant de porter le diagnostic il faut éliminer les patients présentant une lésion cérébrale traumatique récente ou une épilepsie active (sous traitement pour la prophylaxie des crises ou une crise au cours des deux dernières années).

Les diagnostics différentiels sont :

  • Amnésie épileptique transitoire (AET).
  • Amnésie ischémique
  • Hémorragie cérébrale
  • Amnésie psychogène (dissociative)
  • Délire
  • Syndrome de Korsakoff
  • Encéphalite limbique
  • Lésion cérébrale traumatique
  • Amnésie d'origine médicamenteuse

La physiopathologie de l’amnésie global transitoire est inconnue, explique encore le neurologue. Ce que l'on sait, en revanche, c'est "qu'il s'agit d'un syndrome limité et bénin ; en particulier, il n'y a pas de risque accru d'accidents vasculaires cérébraux ultérieurs." Le risque de récidive est extrêmement faible. Selon les critères pertinents, le diagnostic peut être posé cliniquement avec des manifestations typiques. En principe, des éclaircissements supplémentaires ne sont pas nécessaires pour l’amnésie globale transitoire proprement dite.

D'ailleurs, selon lui, le patient norvégien du Neurolgen a décidé d'attendre le jour de Noël pour voir ce qu'il avait acheté comme cadeau. Lorsqu'il s'est avéré qu'"il avait fait un bon choix, la fête et l'ambiance festive ont été sauvées".

Cet article a été initialement écrit par Thomas Kron et publié sur Univadis Allemagne.