Cancer du sein : un tiers des femmes n’observeraient pas correctement leur traitement hormonal adjuvant à 5 ans

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales
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À retenir

Une équipe franco-canadienne s’est intéressée à la persistance à 5 ans d’un traitement par hormonothérapie adjuvante et les facteurs associés à celle-ci à partir d’une cohorte de plus de 30.000 femmes françaises atteintes de cancer du sein. Les résultats indiquent que près d’un tiers n’observaient pas leur traitement de façon optimale dans le temps, et que les principaux facteurs associés à cela seraient l’âge de moins de 50 ans ou supérieur à 70 ans et le fait de changer de traitement d’hormonothérapie adjuvante. 

Pourquoi ces résultats sont-ils intéressants ?

Grâce aux évolutions apportées au dépistage, au diagnostic et aux avancées thérapeutiques, la survie à 5 ans post-cancer du sein s’est améliorée pour atteindre 89,9%. Les traitements hormonaux adjuvants ont montré leur bénéfice sur la survie à long terme des patientes traitées pour cancer du sein. Bien que ceux-ci doivent être pris quotidiennement durant 5 ans, beaucoup de femmes ne le prennent pas correctement ou l’arrêtent prématurément. Beaucoup d’études évaluent l’observance dans ce domaine en considérant les choses de manière binaire : observance/non-observance, avec un seuil fixé à 80% de prise correcte d’un traitement. L’étude présentée ici apporte des données plus fines dans le temps, plus justes et donc d’autres éléments de compréhension des trajectoires d’évolution de l’observance dans le temps.

Méthodologie

Toutes les femmes qui ont reçu un premier diagnostic de cancer du sein non métastatique en 2011 en France et qui commençaient un traitement à base d’hormonothérapie adjuvante (tamoxifène ou inhibiteur des aromatases) dans les 12 mois post-chirurgie mammaire ont été incluses dans la cohorte. Tous les traitements d’hormonothérapie adjuvante remboursés par la sécurité sociale ont été identifiés et des trajectoires d’observance de ces traitements – à partir des données de remboursement - ont été modélisées sur 5 ans. L’association de facteurs spécifiques à ces trajectoires a ensuite été recherchée.

Principaux résultats

Au total, 33.260 femmes ont été incluses dans les analyses (âge moyen 61 ans). La plupart d’entre elles ont eu une chirurgie conservatrice (79%). Sur l’ensemble de la population, 35% avaient également une chimiothérapie adjuvante et 72% une radiothérapie adjuvante. La première hormonothérapie adjuvante était plus souvent un inhibiteur des aromatases (69%) que le tamoxifène (31%). Sur l’ensemble de la cohorte, 9,5% sont décédées au cours du suivi, 16,4% ont eu une récidive de cancer du sein ou un second cancer. Trente-cinq pourcents des femmes avaient changé de traitement hormonal substitutif au cours des 5 ans. Celles qui avaient initié un traitement par tamoxifène étaient plus susceptibles d’avoir une mauvaise observance que les autres (84% versus 64%).

Si l’on considère la définition habituelle de l’observance (prise correcte ≥80%), l’observance avait diminué de 87% à 71% entre la deuxième et la cinquième année de suivi.

Six trajectoires d’observance du traitement hormonal adjuvant ont été déterminées :

  1. L’arrêt immédiat du traitement a concerné 6,6% des femmes de la population de l’étude. Cette trajectoire était souvent associée à la prise d’un traitement par anti-HER2, ce qui peut être considéré comme un signe de cancer de mauvais pronostic. 
  2. Une observance suboptimale continue concernait 4,3% des femmes,
  3. Une diminution progressive de l’observance, puis l’arrêt du traitement 6,3%. Cette trajectoire était plus souvent retrouvée chez les femmes de moins de 50 ans ou de plus de 70 ans, traitées par chimiothérapie adjuvante et ayant eu une mastectomie et un traitement par radiothérapie.
  4. Une mauvaise observance précoce suivie de l’arrêt du traitement concernait 5,7% des femmes de la cohorte. Celles-ci étaient plus souvent des femmes qui avaient subi une mastectomie totale et qui ne recevaient pas de traitement de chimiothérapie adjuvante.
  5. Une observance optimale continue a été mise en évidence chez plus des deux tiers de la population incluse (68,8%). Ces femmes avaient principalement entre 60 et 70 ans et étaient plus susceptibles d’avoir initié un traitement par inhibiteur d’aromatase.  
  6. Enfin, 8,3% des patientes étaient devenues moins observantes tardivement, puis avaient arrêté leur traitement. Cette trajectoire concernait plutôt des femmes qui n’avaient aucun traitement néoadjuvant ou autre traitement adjuvant.