Association entre santé cardiovasculaire et orientation sexuelle

  • Caroline Guignot
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Selon une étude française ayant utilisé deux scores de santé cardiovasculaire différents, les femmes déclarant appartenir à une minorité sexuelle avaient des scores plus défavorables que celles se déclarant hétérosexuelles, tandis que l’inverse était observé dans la population masculine. Cette observation pourrait être liée à des différence en termes de niveaux d'exposition aux facteurs de stress -comme la discrimination- ou en termes de capacités d'adaptation et de résilience face à ces facteurs de stress, entre minorités sexuelles masculines et féminines, et entre ces minorités et leurs homologues d’orientation hétérosexuelle.

  • Les disparités observées concernant la santé cardiovasculaire des hommes selon leur lieu d’habitat (urbain ou rural), qui n’est pas retrouvée chez les femmes, suggèrent soit un stress supérieur dans les zones rurales pour les minorités sexuelles masculines versus féminines, soit une puissance statistique insuffisante chez ces dernières.

  • Les auteurs estiment que la supériorité de la santé cardiovasculaire parmi les minorités sexuelles masculines mériterait d’être explorée. La confirmation prospective du lien entre santé cardiovasculaire et risque de maladie cardiovasculaire dans cette population serait nécessaire.

Pourquoi est-ce important ?

Récemment, des scores de santé cardiovasculaire globaux ont été mis au point, qui permettent de compiler notamment plusieurs paramètres d’hygiène de vie pour obtenir une évaluation plus globale que la prise en compte individuelle des facteurs de risque. De fait, aucune étude en population ne les a utilisés afin de confirmer les données d’études préalables, menées sur la base de différents facteurs de risque non colligés, et suggérant que les minorités sexuelles ont un risque cardiovasculaire supérieur à celui des personnes se déclarant hétérosexuelles. Aussi, ce travail est le premier à permettre de vérifier et préciser la disparité entre les minorités sexuelles et les sujets hétérosexuels.

Méthodologie

Ce travail a été conduit à partir des données de l’étude prospective de cohorte française CONSTANCES qui, entre 2012 et 2020, a recruté des adultes qui s’étaient vu proposer de participer à l’étude et, conséquemment, qui acceptaient de se soumettre tous les 4 ans à un bilan clinique et biologique.

Ils avaient aussi été invités à indiquer leur orientation sexuelle (lesbiennes, gays, hétérosexuels, bisexuels). Par ailleurs, leurs données ont permis d’établir deux scores de santé cardiovasculaire : Life Essential 8 (LE8) basé sur 8 paramètres (régime alimentaire, activité physique, tabagisme, indice de masse corporelle, qualité du sommeil, pression artérielle, glycémie et cholestérolémie) et Life Simple 7 (LF7) basé sur sept items (les mêmes hormis la qualité du sommeil). Ainsi, les deux scores ont été comparés selon l’orientation sexuelle déclarée par les participants. Un score élevé signifie une meilleure santé cardiovasculaire.

Principaux résultats

Au total, 169.434 participants ont été recrutés (53,6% de femmes, âge moyen 46 ans). Parmi la cohorte des femmes, 92,83% se déclaraient hétérosexuelles 3,47% bisexuelles et 0,61% lesbiennes (3,09% de non-réponse) et, parmi les hommes, 90,37% se déclaraient hétérosexuels, 3,08 % homosexuels et 3,50% bisexuels (3,05% de non-réponse). Les femmes avaient globalement des scores LE8 et LS7 supérieurs à ceux des hommes.

Après ajustement sur les facteurs de confusion (âge, niveau socio-économique, alcool, santé mentale), les femmes lesbiennes ou bisexuelles avaient un score LE8 significativement inférieur à celui des femmes hétérosexuelles (β=-0,95 [-1,89 à -0,02] et β=-0,78 [-1,18 à -0,38] respectivement). À l’inverse, les hommes homosexuels et bisexuels avaient un score LE8 significativement plus élevé que les hommes hétérosexuels (β=2,72 [2,25-3,19]) (β=0,83 [0,39-1,27] respectivement) après ajustement sur les facteurs de confusion. Les données relatives au score LS7 allaient dans le même sens.

Les analyses stratifiées chez les femmes montrent l’absence de différence entre les différents groupes d’orientation sexuelle lorsqu’elles avaient eu au moins une grossesse. La ménopause ne modifiait pas l’association observée entre risque cardiovasculaire et orientation sexuelle.

Les analyses stratifiées chez les hommes montrent que ceux qui appartiennent à une minorité sexuelle ont des scores plus élevés que les hommes se déclarant hétérosexuels dans les zones urbaines. L’inverse était constaté dans les zones rurales.