Alzheimer : Échec d’un anticorps anti-tau dans les premiers stades de la maladie

  • Teng E & al.
  • JAMA Neurol
  • 13 juin 2022

  • Par Caroline Guignot
  • Résumé d’articles
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À retenir

  • Selon une étude clinique ayant évalué la preuve de concept du semorinemab, un anticorps monoclonal anti-tau, versus placebo, aucune différence n'a été observée dans la maladie d’Alzheimer (MA) prodromique ou légère quant à l’évolution des capacités cognitives ou fonctionnelles à 73 semaines, ou sur le plan de l’imagerie et ce, quelle que soit la dose administrée et malgré les données précliniques probantes.

  • L'imagerie PET-scan montre une évolution identique entre les groupes. Aussi, si le sémorinemab semble moduler la concentration de la protéine tau dans le LCR, les données ne permettent pas de savoir quelle proportion l'anticorps parvient dans le système nerveux central.

  • Des développements permettant de cibler d'autres épitopes de tau et/ou d’autres stades de la MA pourraient aider à déterminer si cette approche reste valable ou si elle doit être abandonnée.

Pourquoi est-ce important ?

La maladie d’Alzheimer est une tauopathie dans laquelle la démence est notamment liée à une dégénérescence neurofibrillaire liée à la protéine tau phosphorylée . Des études précliniques ayant montré qu’une immunothérapie passive dirigée contre la protéine tau peut ralentir l’évolution de cette dégénérescence, des anticorps monoclonaux spécifiques ont été développés. Le semorinemab (ou RG6100) est un anticorps monoclonal humanisé qui cible le domaine N-terminal de la protéine tau et qui présente l’avantage de pouvoir se lier à toutes les isoformes de la protéine tau avec une forte affinité et spécificité. Les expérimentations chez la souris ont été convaincantes et l’étude de phase 1 a montré une réponse dose-dépendante. Le développement de la molécule a donc été poursuivi.

Méthodologie

L'étude Tauriel est une étude de phase 2, multicentrique, randomisée, en double aveugle, contrôlée versus placebo. Elle a inclus des personnes âgées de 50 à 80 ans ayant une MA prodromique à légère, associée à un score MMSE (Mini-Mental State Examination) de 20-30 points et une pathologie β-amyloïde confirmée par imagerie ou dosage du liquide céphalo-rachidien.

Les patients ont été randomisés (2:3:2:3) entre 1.500 mg, 4.500 mg et 8.100 mg de semorinemab et le placebo durant 73 semaines. Le principal critère d'évaluation était le changement du score CDR-SB (coté entre 0 et 18, les scores élevés indiquant une plus grande déficience),qui évalue six domaines cognitifs/fonctionnels (mémoire, orientation, jugement et résolution de problèmes, affaires communautaires, maison et loisirs, et soins personnels).

Les mesures secondaires d'efficacité comprenaient le changement entre le début de l'étude et la semaine 73 sur la version en 13 points de l'échelle d'évaluation de la maladie d'Alzheimer - sous-échelle cognitive (ADAS-Cog-13), RBANS, et les 'échelles des activités de la vie quotidienne ADCS-ADL et A-IADL-Q.

Principaux résultats

Au total, 457 patients ont été recrutés et répartis entre les 4 groupes (âge moyen 69-70 ans, 51 à 59% de femmes, 76 à 82 % d’études supérieures, 72-75 % porteurs d’APOE4) et 58-66% ayant une MA légère).

Dans la cohorte modifiée en intention de traiter (n=422), l’évolution du score CDR-SB entre l’inclusion et la 73 e semaine était comparable sous placebo (différence 2,19 [1,74-2,63]) et le semorinemab (différence entre 2,36 [1,83-2,89] et 2,41 [1,88-2,94] selon la posologie).

À 73 semaines, la concentration plasmatique totale de tau a augmenté de manière dose-dépendante dans les différents groupes sous semorinemab (plateau au-dessus de 4500 mg) expliquée par le fait que les Ac anti-tau augmentent la demi-vie circulante de la protéine. Ce taux était inchangé sous placebo. Au niveau du LCR, des baisses modestes de concentration de tau, non dose-dépendantes, ont été observées sous semorinemab, à l’inverse des observations sous placebo.

Sur le plan de la sécurité, la fréquence des évènements indésirables était comparable dans les bras placebo (93,1%) et semorinemab (entre 88,8% et 94,7% selon la posologie).

FInancement

Cette étude a été sponsorisée par Genentech Inc.