Aliments ultra-transformés et maladies chroniques … que sait-on vraiment ?
- Srour B & al.
- Lancet Gastroenterol Hepatol
- Nathalie Barrès
- Résumé d’article
Pourquoi est-ce important ?
L’incidence des pathologies inflammatoires chroniques, telles que les maladies inflammatoires chroniques des intestins (MICI) et le syndrome métabolique, a augmenté parallèlement à l’augmentation de la consommation de produits transformés. Ce constat a favorisé la recherche de liens éventuels entre les deux. La classification NOVA catégorise les aliments en 4 groupes en fonction de leur degré de transformation, du groupe 1 (aliments pas ou peu transformés) au groupe 4 (aliments ultra-transformés par procédés physiques, chimiques ou biologiques, utilisant des procédés d’hydrogénation, d’hydrolyse, d’extrusion, …).
Les aliments ultra-transformés contiennent par ailleurs des additifs tels que des maltodextrines, des huiles hydrogénées, des amidons modifiés, des agents aromatisants, des colorants, des émulsifiants,… Certains produits présentés comme sains (galettes de légumes substituts de viande, produits dits minceur, ….) sont des aliments ultra-transformés contenant de nombreux additifs alimentaires. Les auteurs de cette revue soulignent que « sur les 220.522 produits ultra-transformés mentionnés par la banque de données française datant de 2020, 21% avaient un Nutri-Score bon selon le système mis en place en mars 2017 par les autorités de santé françaises ».
Une étude menée en 2016 a montré que les aliments ultra-transformés pourraient contribuer jusqu’à 31,1% des apports quotidiens en calories en France, 56,8% au Royaume-Uni et 57,9% aux États-Unis.
Jusqu’à présent 48 études prospectives auraient exploré l’association entre la consommation de produits ultra-transformés et la santé. Les plus grandes études prospectives sur le sujet s’appuient sur la cohorte française NutriNet-Santé et la cohorte espagnole SUN.
Principaux résultats
Sur la base des 48 études prospectives ayant évalué les associations entre ceux qui consomment le plus de produits ultra-transformés et ceux qui en consomment le moins, sur différents déterminants de la santé, il a été observé que :
- Le risque de mortalité serait accru de 26% à 62% (six études menées en population générale et une chez des sujets atteints de pathologies chroniques) chez ceux qui consomment le plus d’aliments ultra-transformés.
- Le risque de développer un diabète de type 2 serait augmenté de 26% à 53% (quatre études), et le risque de diabète gestationnel et de prise de poids durant la grossesse favorisé (une étude), toujours chez les plus gros consommateurs de produits ultra-transformés. Le risque d’hypertension serait quant à lui augmenté de 21% à 35% (quatre études).
- Pour l’instant, une seule étude prospective – basée sur la cohorte NutriNet-Santé - a évalué l’association entre consommation de produits ultra-transformés et risque de cancer. Une association positive a été mise en évidence avec le risque de cancer en général et le risque de cancer du sein plus spécifiquement.
- Plusieurs études prospectives ont permis d’observer l’augmentation du risque de surpoids (+36%), d’obésité globale (+55%) ou d’obésité abdominale (+41%) chez les plus gros consommateurs de produits ultra-transformés.
- Une augmentation du poids, du tour de taille, de l’indice de masse grasse, de la dégradation du profil lipidique a été mise en évidence chez les gros consommateurs de produits ultra-transformés.
- L’augmentation du risque de maladies inflammatoires chroniques des intestins serait plus manifeste pour la maladie de Crohn chez les gros consommateurs de produits ultra-transformés. Les données sont moins probantes pour la rectocolite hémorragique.
- La forte consommation de produits ultra-transformés augmenterait également le risque de dépression ou de symptômes dépressifs, de dyslipidémie, de déclin de la fonction rénale, de fragilité, de diminution de la force musculaire et de maladies hépatiques non alcooliques.
Quels sont les processus physiopathologiques sous-jacents ?
- Les aliments ultra-transformés présentent moins d’intérêt nutritionnel que les autres, du fait de l’augmentation des apports en sel, sucre, acides gras saturés et des apports énergétiques au global et une diminution des apports en fibres, vitamines et micronutriments. Autant d’éléments qui impactent le développement des maladies chroniques évoquées plus haut.
- Les aliments ultra-transformés pourraient contenir des produits potentiellement toxiques comme des furanes, des amines hétérocycliques, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, l’acroléine, des produits terminaux de la glycation, des acides gras trans industriels, des acrylamides.
- Ils pourraient également contenir des contaminants qui auraient migrés à partir du contenant tels que les phtalates, les bisphénols, les huiles minérales et les microplastiques. Les longues durées de conservation de ces produits favorisent bien souvent ces migrations. Des études ont suggéré que certains de ces contaminants (acrylamide, amines hétérocycliques, hydrocarbures aromatiques polycycliques et l’acroléine pourraient avoir des propriétés carcinogènes, ou augmenter le risque de maladie cardiovasculaire et de résistance à l’insuline.
Le rôle central du microbiote intestinal
- Les analyses fonctionnelles du microbiote intestinal ont montré une augmentation du traitement des sucres simples et de la mise à disposition de calories par le microbiote en présence d’une alimentation riche en graisses. Ces dérèglements et la présence d’une inflammation de bas grade favorisent les altérations de la fonction de barrière de la muqueuse intestinale entrainant une augmentation des concentrations systémiques en produits issus de ces bactéries, comme le lipopolysaccharide issu de la paroi des bactéries Gram-négatif. Cette substance, une fois dans le sang, s’infiltre dans les tissus comme le foie et les tissus adipeux, déclenchant les processus liés à l’inflammation et aux pathologies métaboliques (obésité, insulino-résistance). Les produits ultra-transformés agissent également en diminuant les produits bénéfiques fabriqués par le microbiote tels que les acides gras à chaîne courte.
- Les édulcorants, qui sont parmi les additifs les plus utilisés par l’industrie, affecteraient la tolérance au glucose via le microbiote intestinal. D’autres additifs alimentaires comme les émulsifiants (gomme guar, gomme xanthane, polysorbate-80, carboxymethylcelllulose, …) ou des nanoparticules favoriseraient également les dysbioses intestinales et le risque associé de développer d’une pathologie chronique.
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