AFU 2021 - Endométriose : quelle place pour l'urologue ?

  • Marine Cygler

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Congrès
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Si l'endométriose est une maladie gynécologique, elle a la particularité de sortir du seul champ de cette spécialité tant pour le diagnostic que le traitement. Elle a un impact considérable sur l'appareil urinaire. Aussi l'urologue a sa place à côté du gynécologue et du chirurgien digestif. Cette nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire a été réaffirmée à l'occasion du 115ème congrès de l'Association française d'Urologie (AFU) qui s'est tenu du 17 au 20 novembre à Paris, par les Prs Jean-Nicolas Cornu et Xavier Gamé[1].

 

Pourquoi le système urinaire est-il touché ? 

Maladie qui touche une femme sur dix en âge de procréer, l'endométriose se caractérise par la présence de cellules endométriales en dehors de l'utérus,  ce qui peut provoquer des inflammations, des rétractions et des atteintes des tissus environnants.  « Comme l'utérus est placé au centre du pelvis, les cellules peuvent diffuser partout, c'est-à-dire au niveau vésical, urétral, recto colique...  », explique le Pr Jean-Nicolas Cornu (chirurgien urologue, CHU de Rouen), coordinateur du Comité d'Urologie et de Pelvipérinéologie de la Femme de l'AFU (CUROPF).

« Le message pour les urologues, c'est qu'il faut savoir y penser chez une femme jeune en âge de procréer devant un symptôme urinaire qu'on ne comprend pas », poursuit-il. Les signes cliniques urinaires sont très variés, aux premiers rangs desquels on trouve les troubles de remplissage de la vessie, avec des urgences et une augmentation de la fréquence urinaire, des douleurs à la miction qui miment une cystite, ou encore des sensations de vidange. L'urologue peut donc être à l'origine du diagnostic quand il pense à prescrire une IRM pelvienne.

Comment l'endométriose peut-elle avoir un retentissement sur le système urinaire ? Le Pr Cornu a présenté quatre modalités :

  • L'infiltration des tissus : l'envahissement de la vessie peut avoir un retentissement sur le fonctionnement vésical, avec possiblement un syndrome irritatif très lourd.

  • L'inflammation de continuité : si le mécanisme est encore mal connu, il semblerait que les organes puissent communiquer entre eux par des messages nerveux projetés. Aussi lorsque l'utérus est malade, l'inflammation peut transmettre une information à la vessie et perturber son fonctionnement. Cela peut se traduire par une envie d'uriner, une gêne ou encore une sensation de vessie mal vidangée.

  • L'infiltration des nerfs : tous les nerfs du pelvis peuvent être touchés, ce qui empêche la vessie de fonctionner correctement.

  • Les dégâts collatéraux de la chirurgie : lors d'une opération, en particulier quand l'endométriose est profonde, c'est-à-dire quand les lésions infiltrent les tissus environnants à une profondeur supérieure à 5mm, la vessie et les uretères peuvent être lésées accidentellement.

 

L'urologue dans le traitement de l'endométriose

Outre le fait que l'endométriose a un retentissement non négligeable sur le fonctionnement du bas appareil urinaire et que l'urologue a sa place dans sa prise en charge, ce spécialiste peut aussi être à l'origine du diagnostic, par exemple quand une femme est orientée vers lui à cause de douleurs pelviennes chroniques. 

D'un point de vue thérapeutique, l'urologue peut intervenir dans trois situations différentes : pour traiter les symptômes urinaires, pour réaliser une chirurgie à quatre mains lorsque des lésions se localisent aussi sur l'appareil urinaire et enfin pour traiter les complications de la chirurgie elle-même.

À ce propos, le Pr Xavier Gamé (chirurgien urologue, CHU Rangueil de Toulouse) explique rencontrer trop fréquemment des patientes « qui viennent [le] voir pour une dysurie, voire une rétention chronique d'urine après la chirurgie ».

Or, jusqu'à la moitié d'entre elles , souligne-t-il, présentait en fait déjà des symptômes urinaires liés à l'endométriose mais la plupart l'ignorait. « C'est donc très important que l'urologue voit les patientes avec endométriose avant la chirurgie pour rechercher les signes cliniques urinaires mais aussi les prévenir des risques de la chirurgie et les rassurer sur les possibilités thérapeutiques en cas de complications », considère le secrétaire général de l'AFU, qui plaide pour la mise en place d'un chemin clinique tracé dans des centres de référence pour les patientes atteintes d'endométriose.

Cet article a initialement été publié sur le site internet Medscape.