Le cancer étant devenu une maladie chronique, les conséquences à long terme de la maladie et du traitement sont mieux connues. Ainsi, la plainte cognitive apparaît comme une problématique fréquente : selon les études, elle concernerait 15 à 75% des patients, des données dont l’hétérogénéité tient sans doute au moment, à la nature, à la définition de la plainte, et à la nature des scores utilisés pour les évaluer.
A long terme, près d’un tiers des patients se plaindraient de troubles cognitifs. Les plaintes secondaires à la chimiothérapie ont sans doute été parmi les premières décrites, avec le chemfog (brouillard cognitif) des femmes ayant un cancer du sein, et apparaissant dose dépendante et produit dépendant. Mais il est aussi décrit que les thérapies ciblées et autres traitements anticancéreux non médicamenteux peuvent être impliqués, ainsi que des facteurs de risque modifiables (hygiène de vie, santé mentale, ….) ou non modifiables (âge, comorbidités, facteurs socioéconomiques,…).
Si les troubles les plus fréquents sont les troubles de l’attention, des fonctions exécutives, de vitesse de traitement, et un ralentissement global, les plaintes évoquées par les patients sont diverses : difficultés à se rappeler de certaines choses (mots, noms…), de certaines tâches habituelles (trajets, routines…), difficultés de concentration, de mémorisation... Elles ont de fait un impact important sur la qualité de vie, la vie personnelle, sociale ou professionnelle, notamment lorsqu’elles concernent les sujets les plus jeunes. Elles peuvent engendrer une perte de confiance, une moindre sociabilisation et une moindre tolérance au stress et à l’irritabilité. Ces troubles sont constants ou transitoires, peuvent évoluer avec le temps mais peuvent souvent n’apparaître qu’à distance de la prise en charge du cancer.
L’origine de ces plaintes est multifactorielle et leur origine ne peut être uniquement expliquée par la fatigue ou la dépression engendrées par la maladie. Les données de neuro-imagerie confirment l’existence de modifications fonctionnelles et structurelles, avec notamment une altération de la connectivité et parfois du volume cérébral et de la substance blanche.
Une prise en charge encore incomplètement formalisée
Tout l’enjeu reste à prendre en charge ces plaintes : la difficulté à les évaluer tient au fait qu'elles peuvent varier en fonction du temps et peuvent ne pas être perçues par le patient au décours du diagnostic ou au cours du traitement parce que d’autres troubles, psychiques et physiques, en cachent la perception. De plus, il est difficile d’identifier des facteurs prédictifs ou de vulnérabilité. Cependant, des recommandations émises par l’ International Cognition and Cancer Task Force Conference suggèrent d’interroger les patients à intervalles précis, en utilisant différents tests, qui restent toutefois insuffisamment adaptés. Tous les cofacteurs, comme les troubles de l’humeur ou du sommeil doivent a minima être évalués dans le même temps étant donné l’intrication importante qu’ils ont avec eux.
La prise en charge doit être adaptée à la personne, à la nature et au timing de la plainte par rapport à la prise en charge de son cancer. Le patient doit être informé, et sa plainte doit être légitimée. Des recommandations simples peuvent être apportées : éviter les tâches simultanées, organiser les informations à retenir, les tâches à effectuer, repérer les moments de la journée où la vulnérabilité est plus grande…. Un accompagnement psychologique est souvent nécessaire et des pratiques complémentaires peuvent être proposées pour améliorer la qualité de vie (sophrologie, arthérapie…). Si nécessaire, d’autres interventions peuvent être proposées : des interventions comportementales globales (méditation, acupuncture…) ou centrées sur la cognition, une prise en charge physique (kinésithérapie, reconditionnement à l’effort, activité physique adaptée), de l’orthophonie ou une stimulation cognitive...Une méta-analyse en réseau a synthétisé les données cliniques disponibles et suggère que les plus probantes concernent l’exercice aérobie, la réhabilitation cognitive et l’entraînement cognitif.
La mise en place d’une évaluation systématique à intervalles réguliers au cours de la prise en charge pourrait constituer un moyen facilitant pour identifier les personnes les plus vulnérables et proposer un parcours de soins adapté.
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