63% des professionnels de santé n'ont pas... la santé

  • Jean-Bernard Gervais
  • Actualités professionnelles
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"Comment ça va, docteur?"  C'est la question que s'est posée la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professionnels de santé Agnès Firmin le Bodo. Le ministère de la santé a annoncé le 30 mars dernier le lancement d’"un grand chantier national dédié à la santé des professionnels de santé, en y associant l’ensemble des parties prenantes." [1] Première étape de ce vaste projet : le dévoilement des résultats d'un questionnaire co-construit avec les fédérations hospitalières (FHF, FHP, Fehap, etc.) des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés solidaires, Unicancer, le Groupe SOS, la Croix-Rouge, ou encore des organisations représentatives des professionnels de santé, ainsi que la mutuelle nationale des hospitaliers (MNH) lors du congrès hospitalier Santexpo le 23 mai dernier. 

Stress au travail pour 71% des répondants

Que nous révèle les résultats de ce questionnaire, renseigné par 50.000 professionnels de santé (de l’aide-soignant au médecin chef de service en passant par l’infirmier) ? 

  • «63% [des répondants] estiment que leur état de santé n’est pas bon (en y incluant les «très mauvais», les «mauvais» et les «assez bon») ; 
  • 53% donnent une note inférieure à 7/10 concernant leur vie actuelle ; 
  • 71% estiment le niveau de stress lié à l’activité professionnelle supérieur à 6/10 ; 
  • 77% estiment ne pas dormir suffisamment ; 64% évaluent leur état de fatigue inférieur ou égal à 5/10 ; 
  • 14% déclarent ne pas avoir de médecin traitant ; 
  • Seulement 11% des professionnels de santé y ayant accès, jugent que leur dernière consultation auprès de la médecine du travail a eu un impact positif.»

«Sentiment d’être faibles»

Présent lors de la présentation de ces résultats à Santexpo, le Dr Philippe Denormandie, l'un des experts qui a conduit cette enquête, a tenté d'expliquer pourquoi les professionnels de santé négligeaient autant leur propre santé : "La santé des soignants est un sujet peu discuté entre nous, pour différentes raisons. Les professionnels de santé ne veulent pas donner le sentiment d'être faibles." Pour remédier à cet état de fait, la ministre devrait présenter fin juin les "premières mesures de la feuille de route partagée et pluriannuelle visant à préserver, promouvoir et améliorer la santé des professionnels de santé". 

Plan pour la santé des soignants

D'ores et déjà, Agnès Firmin le Bodo a esquissé les grandes lignes de ce plan, qui donnera la priorité à la prévention. Des actions de sensibilisation seront instituées, "ainsi que des programmes d’information et de formation pour accompagner les professionnels de santé", afin de gérer le stress au travail, et de prévenir tout risque psychosocial. En matière d'environnement de travail, les pouvoirs publics vont inciter les directions hospitalières à travailler sur l'organisation du temps de travail. Bilans de santé, consultations auprès de la médecine du travail pour les libéraux... seront également facilités. En vue d'apporter un soutien psychologique, mais aussi pour prévenir face aux risques de l'automédication, les autorités promettent la mise en place d'une plate-forme en ligne ainsi qu'une ligne téléphonique dédiée. 

Recherche

Enfin, la recherche n'est pas non plus marginalisée : une vaste enquête de la Drees (direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) sur la santé mentale des professionnels de santé, dont les résultats devraient être connus courant juin, vont permettre de guider les choix des autorités de tutelle. Les annonces de ce nouveau plan santé des soignants n'ont pas suscité de réactions de la part des principaux concernés. Sur les réseaux sociaux, néanmoins, des professionnels de santé se lamentaient de l'état de la médecine du travail, censé prendre en charge la santé des soignants [2] : "@agnesfirmin

Connaissez-vous l’état de délabrement des services de santé au travail dans les établissements de Santé ? Les effectifs sont insuffisants depuis des années et nos collègues ne peuvent assurer leurs missions."