41 cas de dengue autochtone référencés depuis début mai, un record alerte la DGS
- Aude Lecrubier
- Nathalie Barrès
- Actualités Médicales par Medscape
Depuis le 1er mai, 41 cas de dengue autochtone ont été signalés en France métropolitaine dans les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie au sein de 5 foyers infectieux, selon la DGS[1]. En tout, trois nouveaux départements jusqu'ici épargnés sont touchés (66, 65, 31).
Ces cas sont survenus chez des personnes n’ayant pas voyagé en zone de circulation du virus dans les 15 jours précédant l’apparition des symptômes.
Si le nombre de cas reste globalement peu élevé, il s’agit d’un record en métropole, alerte la DGS.
Au cours des trois années précédentes, 2019, 2020 et 2021, 9, 14 et deux cas de dengue autochtones respectivement ont été rapportés sur la période de surveillance annuelle de début mai à fin novembre.
Sur les 5 foyers identifiés en 2022, deux sont clôts. En revanche, trois sont actuellement en cours, l'un à Andrest et Rabastens dns les Hautes Pyrénées (4 cas entre le 11 juillet et le 28 août) et l'un à Salvetat saint Gilles (31) avec 4 cas intrafamiliaux (début des symptômes entre le 14 et le 20 août). Le troisième, le plus préoccupant, est situé à St Jeannet/Gattières/La Gaude (Alpes Maritimes). Il s'agit d'un foyer de 26 cas dont les symptômes ont débuté entre le 1er août et le 1er septembre. "Le nombre de cas est susceptible de bouger", a indiqué Marie Claire Paty (DMI, SPF) concernant ce cluster, lors d'une conférence de presse le 16 septembre.
En métropole, le moustique Aedes albopictus ou moustique tigre, vecteur de la maladie, est à ce jour implanté durablement dans 67 départements – contre 51 en 2019.
Comment expliquer cette augmentation des cas ? D'une part par l'extension de l'implantation du moutique tigre sur le territoire métropolitain mais aussi par "les températures chaudes, les innondations mais aussi les sécheresses qui favorisent la pullutation des moustiques et la transmission des virus. Aussi, les mouvements de personnes, de voyageurs mais aussi des biens et les questions d'urbanisation participent à l'éclosion des épidémies dans le monde et du risque de transmission dans des pays classiquement épargnés comme les pays tempérés, dont la France", a indiqué l'experte en maladies infectieuses.
"L'évolution prévisible, c'est que nous allons vers une extension et une multiplication de ces épisodes", a-t-elle souligné.
Symptômes et diagnostic
On suspecte la dengue en présence d’une forte fièvre (40°C), accompagnée de 2 des symptômes suivants : céphalées sévères, douleurs rétro-orbitaires, musculaires, articulaires, nausées, vomissements, adénopathie ou éruption cutanée. Les symptômes se manifestent dans les 3 à 14 jours (4 à 7 jours en moyenne) qui suivent la piqure par le moustique.
La dengue sévère (hémorragique) survient dans environ 1% des cas. Il s’agit d’une complication potentiellement mortelle due à une fuite plasmatique, une accumulation liquidienne, une détresse respiratoire, des hémorragies profuses ou une insuffisance organique. Les signes d’alerte surviennent de 3 à 7 jours après les premiers symptômes, conjointement à une baisse de la température (en dessous de 38°C).
Les symptômes associés sont des douleurs abdominales sévères, des vomissements persistants, une hyperpnée, des saignements des gencives, de la fatigue, une agitation, du sang dans les vomissures. La mort peut survenir dans les 24 à 48 heures suivantes de cette phase critique ; un traitement médical adapté est alors nécessaire pour éviter les complications et le risque de décès (qui reste faible).
« La dengue touche indifféremment les nourrissons, les jeunes enfants et les adultes », rappelle la DGS qui précise que « le traitement est symptomatique, notamment de la douleur et de la fièvre. L’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont contre-indiqués du fait du risque hémorragique ».
Quelle démarche diagnostique ?
La démarche diagnostique recommandée dans le plan ministériel « anti-dissémination du chikungunya et de la dengue » est la suivante :
- Jusqu’à 5 jours après le début des signes (J5) : RT-PCR,
- Entre J5 et J7 : RT-PCR et sérologie,
- Après J7 : sérologie uniquement (IgG et IgM) avec un second prélèvement de confirmation au plus tôt 10 jours après le premier prélèvement.
Les prélèvements sanguins peuvent être faits par tout laboratoire d’analyses et de biologie médicale. Chaque échantillon doit être accompagné d’une fiche de renseignements cliniques.
Limiter la prolifération des moustiques
Pour éviter l’apparition de foyers épidémiques de dengue mais aussi de chikungunya ou de zika en métropole, la DGS rappelle quelques mesures simples à adopter :
1. Éviter la prolifération des moustiques
Ranger à l’abri de la pluie tout ce qui peut contenir de l’eau (seaux, arrosoirs) ; bâcher hermétiquement ou recouvrir d’une moustiquaire les réserves d'eau (fût, bidon, piscine non traitée) ; vider régulièrement les soucoupes des pots de fleur ;
Veiller au bon écoulement des gouttières ;
Ramasser les déchets verts qui peuvent devenir des lieux de repos pour les moustiques adultes.
2. Se protéger des piqûres des moustiques
Porter des vêtements couvrants et amples ;
Utiliser un répulsif cutané, préférentiellement le matin et en soirée, conseillé par un pharmacien, sur les zones de peau découvertes ;
Si nécessaire, utiliser des grillages-moustiquaires sur les ouvertures (portes et fenêtres) ;
Utiliser des moustiquaires à berceau pour les nouveau-nés ;
Utiliser les diffuseurs électriques à l'intérieur des habitations ;
Utiliser les serpentins insecticides uniquement en extérieur ;
Utiliser les climatiseurs ou les ventilateurs qui gênent les moustiques.
3. Consulter immédiatement
son médecin traitant en présence de symptômes évocateurs (forte fièvre d’apparition brutale, douleurs musculaires ou articulaires, douleurs oculaires, fatigue, maux de tête), en particulier si un diagnostic de COVID a été écarté et s’ils apparaissent dans les 15 jours qui suivent le retour d’un voyage en zone tropicale. Cette consultation est essentielle pour pouvoir être pris en charge et être informé des recommandations sanitaires pour éviter de transmettre la maladie à son tour (en évitant d’être piqué par des moustiques pendant la période de contagiosité).
À noter également, que la population est appelée à renseigner la présence de moustique tigre sur sa commune, et ce d’autant plus qu’elle n’est pas encore colonisée, en la signalant sur le portail officiel des autorités sanitaires : signalement-moustique.anses.fr.
Les autorités sanitaires rappellent aussi aux professionnels de santé qu’il est « très important de signaler à leur Agence régionale de santé tout cas de dengue, de chikungunya ou de zika ».
En parallèle des actions individuelles, des opérations de démoustication sont mises en place par les ARS dès le signalement d’un cas importé ou d’un cas autochtone afin de réaliser des traitements de lutte anti-vectorielle et limiter ainsi la propagation de la maladie.
Cet article a été écrit par Aude Lecrubier et initialement publié sur Medscape.
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